Real Solutions for What Ails Canada’s Health Care Systems – Lessons from Sweden and the United Kingdom (en Anglais seulement)
Cahier de recherche (en anglais seulement, avec points saillants et introduction en français) présentant deux exemples concrets de systèmes de soins de santé universels libéralisés pouvant être un guide précieux pour les décideurs de partout au Canada
Le gouvernement du Québec, par l’entremise de son ministre de la santé Christian Dubé, présentera bientôt un plan de « refondation » du réseau de la santé. L’IEDM est fier de dévoiler cette importante étude de l’économiste Maria Lily Shaw sur les meilleures pratiques au sein des systèmes de santé de la Suède et du Royaume-Uni – deux exemples que le Québec devrait suivre s’il désire réellement mener à bon terme et de façon diligente cette refonte.
En lien avec cette publication
Une réforme du système de santé en six étapes (La Presse+, 17 février 2022)
Refondation du réseau: 12 solutions pour améliorer notre système de santé (Le Journal de Montréal, 26 février 2022) A recipe for successful health care reform (The Suburban, 2 mars 2022) How can we improve Canada’s ailing health system? Economist Maria Lily Shaw highlights lessons from the UK and Sweden (The Hub, 5 avril 2022) |
Entrevue avec Maria Lily Shaw (Philippe-Vincent Foisy, QUB Radio, 17 février 2022)
Entrevue avec Maria Lily Shaw (Trudeau-Landry, FM 93, 17 février 2022) Entrevue avec Maria Lily Shaw (Droit Devant, FM 106,9, 17 février 2022) |
Ce Cahier de recherche a été préparé par Maria Lily Shaw, économiste à l’IEDM.
Faits saillants
Les systèmes de santé suédois et anglais ont subi des transformations vastes et profondes depuis les années 1980. Résultat de la transition vers un système mixte : la population de ces pays a désormais accès à un système de santé plus flexible qui répond aux besoins rapidement – le tout à un prix semblable ou inférieur à celui de plusieurs systèmes de santé provinciaux au Canada. Les faiblesses du système de santé canadien étant aujourd’hui plus flagrantes que jamais, ces deux exemples concrets de systèmes universels efficacement transformés selon un modèle libéralisé peuvent servir à orienter les décideurs aux quatre coins du pays.
Chapitre 1 − Modèles de réforme des soins de santé
- Le nombre de médecins par 1 000 habitants est presque trois fois plus grand en Suède qu’au Québec et en Colombie-Britannique, et le nombre relatif d’infirmiers et d’infirmières, presque deux fois plus élevé.
- Bien que la Suède dépense un peu plus pour ses soins de santé, l’efficacité de son système est indéniable. En parallèle, le Royaume-Uni, qui dépense moins que le Québec et la Colombie-Britannique, arrive à en faire plus avec moins.
Étude de cas : la Suède
- Dans les années 1970, la dégradation du climat économique en Suède a suscité un grand débat public autour de l’organisation des services sociaux; inefficaces et hautement bureaucratiques, ils privaient le peuple suédois de sa liberté de choix.
- La cible principale des réformes de santé adoptées en Suède dans les années 1980 et au début des années 1990 était de réduire les coûts et de transférer la responsabilité, alors nationale, de prestation des soins aux comtés régionaux.
- Les efforts de décentralisation se sont poursuivis durant plusieurs années après la réforme Dagmar de 1985, mais la première moitié des années 1990 a été axée sur l’amélioration de l’accès et la réduction des listes d’attente.
- Les comtés régionaux ont commencé à utiliser le financement fondé sur les DRG, selon lequel les hôpitaux reçoivent pour chaque patient traité un montant fixe basé sur le type de patient, la gravité des problèmes de santé et d’autres critères, ce qui encourage l’efficacité et la maîtrise des dépenses.
- À partir de la fin des années 1990, l’industrie pharmaceutique de Suède a été décentralisée et libéralisée, et le système de soins dentaires, réformé.
- À la fin des années 1990 et au début des années 2000, la gestion de plusieurs hôpitaux a été transférée à des entrepreneurs, notamment celle de l’hôpital Saint Göran à Stockholm; du point de vue du patient, il est semblable à n’importe quel autre hôpital public tout en étant un modèle d’efficacité.
- En 2010, la Suède a autorisé l’assurance-maladie privée duplicative et a donné aux patients la possibilité de choisir leur fournisseur de soins primaires par sa loi sur le choix du patient.
Étude de cas : le Royaume-Uni
- Avant leur libéralisation, les établissements de soins de deuxième ligne au Royaume-Uni étaient financés par des budgets historiques, et le système de santé était décrit comme « une organisation rigide aux trop nombreuses strates décisionnelles ».
- La National Health Service and Community Care Act de 1990 a introduit le concept de « marché interne », selon lequel la structure du système de santé s’appuie sur une séparation novatrice des rôles d’acheteur et de fournisseurs de services de santé.
- En 1997, le pouvoir politique a été délégué aux administrations nationales en Angleterre, en Écosse, au pays de Galles et en Irlande du Nord.
- En Angleterre, la concurrence entre les établissements s’est ensuite intensifiée en raison du recours au secteur privé pour la prestation de soins, dépassant ainsi celle qui régnait jusqu’alors dans le marché interne.
- En 2003, l’Angleterre a instauré le mode de paiement selon les résultats, un schéma de financement fondé sur les activités (l’équivalent du financement fondé sur les DRG en Suède) qui encourage l’amélioration du rendement.
- En 2006, tous les patients d’Angleterre ont pu choisir l’hôpital où ils recevraient des soins de deuxième ligne, ce qui a généré des incitatifs financiers encourageant les fournisseurs à améliorer leur rendement sur le plan clinique.
Chapitre 2 − Lancer une réforme significative du système de santé canadien
- La Loi canadienne sur la santé (LCS) n’interdit pas l’assurance duplicative couvrant des services semblables à ceux offerts par le régime d’assurance-maladie, et n’interdit pas non plus explicitement la pratique mixte ou la délégation de la gestion des hôpitaux publics à des entrepreneurs.
- Les provinces canadiennes qui interdisent l’achat d’une assurance duplicative sont parmi les seuls États au système de santé universel à le faire dans le monde.
- Bien que cette objection soit fréquemment soulevée, les médecins pratiquant dans des pays autorisant la pratique mixte, comme l’Australie et le Danemark, ne passent pas moins de temps à s’occuper de patients dans le système public.
- Dans l’affaire Chaoulli, la Cour suprême du Canada a statué que l’interdiction de souscrire une assurance-maladie duplicative au Québec était nulle et inexécutable. Pour reprendre les paroles de la juge en chef de l’époque Beverley McLaughlin, « l’accès à une liste d’attente n’est pas l’accès à des soins de santé ».
- L’Assemblée nationale du Québec, toutefois, n’a pas complètement levé l’interdiction de souscrire une assurance duplicative, comme semblait l’exiger la décision de la Cour suprême.
- L’affaire Cambie (en cours) conteste la constitutionnalité de chaque disposition de la loi sur la santé de la Colombie-Britannique qui a pour effet de bloquer l’émergence et le développement d’un système de santé parallèle, décentralisé et libéralisé.
- Si le plaignant a gain de cause, en tout ou en partie, devant la Cour suprême du Canada, l’affaire Cambie pourrait rapidement accélérer la création d’un système de santé parallèle d’un bout à l’autre du Canada.
Leçons à tirer de la Suède et du Royaume-Uni au Québec et en Colombie-Britannique
- Les réformes présentées dans cette section ont été sélectionnées parce qu’elles sont conformes à la LCS, que leur réussite a été démontrée dans d’autres pays aux soins de santé universels.
- Par ailleurs, l’ordre d’application de ces réformes est probablement aussi important que la réforme elle-même.
- Adopter le dossier médical électronique et améliorer l’accès aux données sur la santé
- Lever l’interdiction touchant l’assurance-maladie duplicative
- Lever l’interdiction touchant la pratique mixte
- Augmenter les effectifs de professionnels de la santé par trois réformes
- Adopter des mécanismes de financement et de paiement encourageant le rendement, l’efficacité et la productivité
- Transférer la gestion de certains hôpitaux à des entrepreneurs et faire plus de place aux soins privés
Malgré l’ampleur de la transformation du système de santé engendrée par les réformes adoptées en Suède et au Royaume-Uni, l’universalité en a été préservée. Ces systèmes sont ainsi des modèles sur lesquels peuvent s’appuyer les politiciens canadiens pour montrer que la participation du secteur privé à la prestation des soins peut s’accroître sans nuire au principe de l’égalité d’accès. Il est temps que les décideurs politiques reconnaissent les avantages d’un système de santé libéralisé en regardant au-delà des lois actuelles et en étudiant les réussites d’autres pays.
Introduction
Les systèmes de soins de santé suédois et britannique ont subi de profondes et vastes transformations depuis les années 1980. Des mesures concrètes ont été prises pour accroître la productivité du système au moyen de réformes en matière de politiques et de l’introduction de la concurrence. Ces réformes ont permis de mettre en place des systèmes plus souples qui favorisent la création de partenariats entre les intervenants publics et privés, la délégation de la gestion des établissements de santé, ainsi qu’une plus grande liberté de choix et un meilleur accès pour les patients.
Lorsque le système d’assurance maladie actuel a été introduit au Canada il y a 74 ans(1), ce système universel s’apparentait à d’autres systèmes publics à accès universel dans des pays comme la Suède et le Royaume-Uni(2). Aujourd’hui, alors que ces deux pays sont passés à une forme ou une autre de systèmes de soins de santé « mixtes » qui intègrent des composantes publiques et privées, le système canadien a malheureusement stagné. Grâce à leur transition vers un système mixte, les populations de la Suède et du Royaume-Uni disposent maintenant de systèmes de santé plus souples, capables de répondre à leurs besoins dans des délais raisonnables, et dont les coûts sont similaires ou inférieurs à ceux de nombreux systèmes de santé provinciaux au Canada(3).
Les systèmes de soins de santé de la Suède et du Royaume-Uni, et leur évolution depuis les années 1980(4), revêtent un intérêt particulier dans le contexte de la future réforme des soins de santé au Canada, et ce, pour plusieurs raisons. D’abord et avant tout, les deux pays ont maintenu l’universalité de leurs systèmes de soins de santé, ce qui signifie que les services de santé financés par l’État sont demeurés accessible à tous. En même temps, ils ont largement décentralisé le processus décisionnel et conféré à leurs autorités régionales et à leurs établissements une grande autonomie opérationnelle, comme l’explique de façon détaillée le premier chapitre du présent document. L’expérience de la Suède et celle du Royaume-Uni pourront donc servir d’exemple aux provinces qui ont entrepris ou envisagent la décentralisation de la gestion de leur système de soins de santé et de leur système hospitalier.
Par ailleurs, ces deux pays sont parmi ceux qui ont sérieusement mis à l’essai les principes de la concurrence réglementée et des marchés intérieurs, des notions qui sont au cœur du débat international sur la réforme des systèmes de santé depuis la fin des années 1980. Les provinces canadiennes peuvent donc s’inspirer des résultats de ces expériences et adopter des politiques ou des réformes similaires. Le modèle de concurrence réglementée dans un système de soins de santé financé par l’État repose sur l’idée que les services de santé sont offerts à la population non pas par une entité monopolistique, comme c’est le cas en grande partie dans les provinces canadiennes, mais plutôt par un certain nombre de fournisseurs indépendants, tant publics que privés, qui se livrent concurrence pour attirer les patients et le financement(5). Les données issues des expériences suédoise et britannique pourraient être fort utiles aux décideurs provinciaux qui s’interrogent sur les méthodes à privilégier pour le paiement des services dispensés par les hôpitaux, les médecins et les autres fournisseurs.
Ainsi, les décideurs canadiens qui souhaitent améliorer leur système de soins de santé peuvent s’inspirer de deux exemples concrets de systèmes de soins de santé universels qui ont réussi la transition d’un réseau de santé entièrement nationalisé à un modèle libéralisé. Cependant, ce ne sont pas toutes les caractéristiques de ces deux systèmes de santé qui doivent être adoptées pour réussir la libéralisation des systèmes de santé provinciaux, mais seulement celles qui répondent le mieux aux besoins de la population. À ce titre, nous présenterons dans le premier chapitre de ce cahier de recherche les réformes les plus efficaces en matière de soins de santé, ainsi qu’un aperçu de certaines caractéristiques et particularités opérationnelles clés des systèmes de santé suédois et britannique avant et après ces réformes.
Pour que de tels changements soient réalisables dans le contexte canadien, il est toutefois nécessaire de relever les politiques publiques et les aspects juridiques qui constituent actuellement les plus grands obstacles à la libéralisation de nos systèmes de santé provinciaux. À cette fin, une analyse des aspects les plus restrictifs des systèmes de soins de santé du Québec et de la Colombie-Britannique sera présentée dans le deuxième chapitre. Ces deux provinces ont été choisies dans la mesure où elles figurent non seulement parmi celles qui présentent le plus d’obstacles juridiques à la libéralisation, mais également parce que les cadres législatifs de ces deux systèmes ont été contestés devant les tribunaux du fait des conséquences de ces obstacles.
Au Québec, l’affaire Chaoulli (2005) a été la première contestation sérieuse du système public monopolistique de soins de santé au Canada. Elle portait, entre autres, sur la question de savoir si une province peut interdire à ses résidents de souscrire une assurance duplicative pour couvrir le coût des services qui sont normalement couverts par le système de santé provincial(6). En Colombie-Britannique, dans l’affaire Cambie qui se poursuit depuis 2009, les plaignants ont demandé au tribunal d’invalider chaque disposition législative de la loi sur la santé de la Colombie-Britannique qui a pour effet de bloquer l’émergence et le développement d’un système de santé parallèle décentralisé et libéralisé(7). Dans ce contexte, le deuxième chapitre explorera également l’affaire Chaoulli et les changements qui en ont découlé dans le système de santé québécois – aussi limités soient-ils, pour des raisons qui seront abordées – de même que les bénéfices qui pourraient découler de l’affaire Cambie advenant un jugement favorable.
Références
- Danielle Martin, et al., « Canada’s universal health-care system: achieving its potential », The Lancet, vol. 391, 28 avril 2018, p. 1718.
- Monica Andersson, Liberalisation, privatisation and regulation in the Swedish healthcare sector/hospitals, Pique, novembre 2006, p. 6; Steve Gold, « Four healthcare systems divided by the English language », The Guardian, 7 juin 2011.
- Voir le Tableau 1-1.
- Donald W. Light, « Cost Containment and the Backdraft of Competition Policies », International Journal of Health Services, vol. 31, no 4, octobre 2001, p. 695-697.
- Productivity Commission, Managed Competition in Health Care, Commonwealth of Australia, 2002, p. XI.
- Bruna Chagnon, « The Chaoulli Case and Its Impacts on Public and Private Health Insurance », Canadian Institute of Actuaries, p. 1.
- Colleen M. Flood et Bryan Thomas, Is Two-Tier Health Care the Future? University of Ottawa Press, 2020, p. 84.