Hydrocarbures: une erreur historique de Québec
Cette semaine, nous apprenions que le gouvernement Legault irait de l’avant avec l’interdiction de l’exploration pour de l’énergie fossile au Québec. Cette décision serait non seulement un coup d’épée dans l’eau en matière de réduction des émissions mondiales de GES, mais aussi un autre revers pour l’économie des régions rurales de la province.
Plus les années passent, plus le discours sur la protection de l’environnement fait fi de l’analyse pragmatique et rationnelle, ainsi que des coûts économiques des décisions de nos responsables politiques. Il est tout à fait possible de lutter contre les changements climatiques sans retirer le pain de la table des familles québécoises.
Une analyse
Tout d’abord, avant d’instaurer une nouvelle politique publique ou réglementation, une analyse coûts-bénéfice rigoureuse doit être réalisée. Sinon, la justification de la mise en œuvre de la mesure reposera uniquement sur des arguments idéologiques ou relevant du dogme. Il faut comprendre que présentement, le Québec n’est responsable que d’environ 0,18 % des émissions mondiales de GES. Sachant que le réchauffement climatique est un phénomène mondial et non provincial, il est donc factuel d’affirmer que, réalistement, tout changement réglementaire au Québec n’a qu’un impact marginal sur celui-ci. Croire que nous pouvons à nous seuls ralentir les changements climatiques est digne d’une histoire de Fred Pellerin.
Prenons l’exemple de la Chine. En seulement 14 heures et 53 minutes, ce pays émet autant de GES que l’objectif de réduction du Québec de 1990 à 2020. Cela ne veut pas dire que nous ne pouvons rien faire pour contribuer à la lutte aux changements climatiques, mais nous devons comprendre que du côté des bénéfices, le Québec n’est qu’un simple petit poisson dans un océan peuplé d’imposantes baleines. Le Québec aurait avantage à faire pression sur ses partenaires commerciaux et sur le monde pour établir une meilleure coopération internationale en matière de protection de l’environnement.
Les impacts négatifs
Quant aux impacts négatifs de l’interdiction d’explorer le sol québécois, nous savons très bien que les ressources de pétrole et de gaz naturel ne se trouvent pas sur l’île de Montréal : elles sont en région. Nous cracherons donc sur des milliers d’emplois dans les communautés rurales ainsi que sur d’importantes retombées fiscales et économiques. J’ai d’ailleurs récemment signé un texte expliquant que les politiques environnementales actuelles sont disproportionnellement coûteuses pour les gens en région par rapport à ceux des centres urbains. Voulons-nous réellement contribuer à accentuer cette inégalité économique?
Il faut aussi comprendre que la demande de pétrole augmentera de 9 % d’ici 2045 et de 29 % pour le gaz naturel d’ici 2040. Il y a donc une opportunité en or pour nos régions de produire des combustibles québécois et de les exporter à travers le monde. Nous pourrions ainsi remplacer les exportations de pays comme l’Arabie saoudite où les droits de la personne et la protection de l’environnement sont trop souvent bafoués.
Ce n’est pas pour rien qu’un récent sondage Ipsos indiquait que la moitié (50 %) des Québécois croient que la province devrait exploiter ses propres ressources pétrolières, alors que seulement 34 % de la population préfère continuer à importer tout le pétrole dont nous avons besoin.
Nous devons cesser de nous accrocher à des positions dogmatiques en matière d’environnement, et privilégier l’analyse factuelle. Le Québec aurait avantage à suivre l’exemple de pays progressistes, comme la Norvège, qui exploitent leurs propres ressources pétrolières et gazières. Avec l’interdiction du gouvernement Legault, nous continuerons d’importer notre pétrole et notre gaz naturel, tout en nous donnant une tape dans le dos pour nos gestes symboliques.
Miguel Ouellette est directeur des opérations et économiste à l’IEDM. Il signe ce texte à titre personnel.