Le surplus budgétaire du Québec : une opportunité pour baisser les taxes, pas pour dépenser plus
La nouvelle est tombée par surprise : Le Québec enregistre aujourd'hui un surplus budgétaire. C'est une bonne nouvelle pour la province dont la plupart des budgets sont écrits à l'encre rouge. Alors que le surplus est accueilli avec enthousiasme, de nombreux commentateurs suggèrent déjà qu'il soit « réinvesti ».
Proposer un réinvestissement est évidemment une façon plus acceptable de suggérer d’augmenter les dépenses. Pour arriver à un budget en équilibre, il est important de contrôler les dépenses et de créer une situation dans laquelle l’équilibre budgétaire serait la norme, et où l'on pourrait même s’attendre à avoir des surplus. Ces surplus devraient être utilisés comme le gouvernement s'était engagé à le faire : une moitié pour réduire les impôts, l'autre moitié pour alléger la dette publique.
Le Québec est l’État où les taxes sont les plus élevées au Canada et aux États-Unis. Des efforts devraient être entrepris pour changer cette réalité. Aujourd'hui, la dette du secteur public québécois dépasse les 278 milliards de dollars.
Il est utile de souligner que la majorité des efforts réalisés par le Québec pour atteindre l'équilibre budgétaire proviennent d’augmentations des taxes, pas de diminutions des dépenses. Le gouvernement a fait des efforts considérables pour ne pas augmenter les dépenses aussi rapidement que dans le passé, une logique essentielle dans une optique de finances publiques saines. La dynamique est néanmoins problématique, les équilibres budgétaires atteints grâce à des augmentations de taxes ayant tendance à être plus fragiles que ceux atteints grâce aux diminutions de dépenses.
En outre, trop de personnes confondent la notion d'État riche avec celle de société riche. Alors que les gouvernements peuvent créer les conditions pour la croissance économique, ils peuvent aussi lui faire obstacle. S'ils dépensent trop (et de manière inefficace), ils vont également taxer et réglementer plus tôt ou tard. En écorchant le mouton plutôt qu'en le tondant, la croissance se retrouve étouffée. C'est le cas au Québec qui souffre de la comparaison avec les autres provinces et États d’Amérique du Nord, en particulier en ce qui a trait aux impôts sur les personnes à bas revenus.
Lorsque vous taxez quelque chose, vous finirez inévitablement par en obtenir moins. Le fardeau fiscal québécois pèse surtout sur les salaires, ce qui implique moins de travailleurs, d'épargne et d'investissement. Si le débat peut encore se poser sur les effets positifs des réductions d'impôts, il est généralement admis qu'elles contribuent à la croissance économique, en particulier si les taxes sont lourdes en comparaison avec d'autres domaines.
Prenez le récent rapport publié par le National Bureau of Economic Research aux États-Unis qui s’est penché sur les taux de taxation entre 1946 et 2012. Il a été démontré dans cette étude qu'une réduction d'un pour cent du taux de taxation augmente le nombre d'heures travaillées de 0,8 pour cent, et cela dans un pays où la participation au marché du travail dépasse déjà les proportions observées au Québec. Une autre étude récente a également observé les effets largement négatifs sur les revenus individuels des hausses des taxes sur les revenus d'entreprise.
De nombreuses études démontrent qu'au-delà d'un certain niveau, les gains sociaux nets des dépenses gouvernementales baissent. C'est probablement le cas au Québec. Les efforts pour réduire les dépenses sont donc justifiés. Au terme du plan budgétaire actuel, on retrouve des dépenses gouvernementales par rapport l’économie qui se situeront au-dessus des niveaux observés en 2003, proches du plateau historiquement haut observé dans les années 1980.
Il y a matière à débat sur la nature des impôts à réduire en premier et sur la manière de procéder. Ce qui est indiscutable, c'est la lourdeur du fardeau fiscal québécois en comparaison avec d'autres États en Amérique du Nord. Nous ne pouvons pas non plus nier le consensus général de la littérature économique indiquant qu'une charge fiscale importante diminue la croissance économique et les conditions de vie de la population.
Durant les dernières élections, les libéraux ont mené campagne en promettant des réductions d’impôts quand la situation budgétaire le permettrait. Leur posture était cohérente. N'ont-ils pas aujourd’hui une belle opportunité de passer de la parole aux actes ?
Jasmin Guénette est vice-président de l'Institut économique de Montréal. Il signe ce texte à titre personnel.
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