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Textes d'opinion

Les guerres oubliées

L’objectif officiel de cette mission, initiée par les mouvements et les partis de gauche à travers le monde ainsi que par les syndicats, est de briser le blocus maritime imposé par Israël à la bande de Gaza et d’apporter de l’aide humanitaire aux Gazaouis. Québec solidaire (QS) prendra part à la mission et enverra une représentante.

Pour les instigateurs de la flottille, Gaza vit une crise humanitaire et il est urgent d’apporter de l’aide aux nécessiteux. Pourtant, Khalil Hamada, un haut fonctionnaire du ministère de la Justice du Hamas, déclarait récemment « Il n’y a pas de famine à Gaza. Personne n’est mort de faim. »

Beaucoup d’obèses

Et que penser de l’étude conduite par l’UNRWA, un programme de l’Organisation des Nations unies pour l’aide aux Palestiniens, qui s’inquiète du taux d’obésité élevé chez les Gazaouis (41,6 % chez les femmes et 31,6 % chez les hommes). Mais ne comptons pas sur QS pour faire la part des choses!

Les militants de gauche affirment vouloir soulager la misère humaine, ce qui est honorable. Mais alors pourquoi restent-ils plutôt passifs devant les dizaines de conflits meurtriers à travers le monde?

En République démocratique du Congo, le conflit, qui fait 45 000 victimes par mois (dont 47 % sont des enfants), a tué au total 5,4 millions de personnes et fait 1,5 million de réfugiés. En Libye, on compte 10 000 morts et 50 000 blessés; au Darfour, 300 000 morts et 2,7 millions de réfugiés; en Angola, 500 000 morts et 3 millions de réfugiés; au Rwanda, 500 000 morts; aux Philippines, 200 000 morts; en Sierra Leone, 50 000 morts et 1 million de réfugiés.

La liste est longue

Et n’oublions pas les conflits au Tchad, en Éthiopie, en Ouganda, au Kurdistan, en Géorgie, au Cachemire, au Sri Lanka, en Birmanie, au Yémen, au Népal, etc. Au total, on répertorie 33 conflits dont les victimes sont, le plus souvent, des civils innocents.

À cela, il faut ajouter le viol de masse comme arme de guerre, l’enrôlement de milliers d’enfants soldats, la torture et le pillage. Tant de conflits oubliés! Tant de victimes ignorées! Tous ces malheureux ne méritent-ils pas autant d’attention que celle qu’on porte à Gaza?

Si les militants de gauche sont réellement sensibles à la misère humaine, s’ils jugent que l’aide humanitaire traditionnelle est insuffisante, s’ils croient que la solidarité ne doit pas faire de distinction entre les races, pourquoi s’indignent-ils avec ostentation face à la misère des uns, mais restent-ils quasi indifférents face à celle des autres?

Si leur volonté d’aider est authentique, ils devraient logiquement organiser autant de flottilles qu’il y a de conflits. Dans le cas contraire, ils appliquent un double standard.

Reste à savoir si notre gauche bien-pensante sera un jour honnête quant aux véritables raisons qui guident ses choix.

Nathalie Elgrably-Lévy est économiste senior à l’Institut économique de Montréal.
* Cette chronique a aussi été publiée dans Le Journal de Québec.

 

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