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Textes d'opinion

La panacée

Depuis le début de la campagne électorale, pas une journée ne s’écoule sans que les candidats me rappellent le rôle du père de la mariée dans le film Le mariage de l’année (version française de My Big Fat Greek Wedding). Tout comme ce dernier qui affirmait que le Windex était un remède miracle à tous les problèmes, nos candidats ont également leur panacée: l’injection de fonds!

Qu’il soit question de l’accès aux soins de santé, du décrochage scolaire, du déficit des universités, de la crise forestière, de l’accès à la propriété, des places en garderie, du manque de relève dans le secteur agricole, des pertes d’emplois dans l’industrie textile, du développement régional, des défis que posent l’environnement ou du développement de sources d’énergies alternatives, l’unique remède qu’ils proposent est d’injecter encore et toujours plus d’argent. Madame David croit même qu’il suffit d’une enveloppe budgétaire de 10 millions $ pour vaincre l’homophobie!

À écouter les candidats, tout ne serait qu’une question de financement. Ils ne se distinguent ni par leurs idées novatrices, ni par leur conception de la société québécoise. Seuls les secteurs qu’ils proposent d’aider et les montants qu’ils comptent injecter les différencient. Or, il faut avoir une vision réductrice du fonctionnement de l’économie et une bien mauvaise compréhension de la nature humaine pour voir dans l’injection de fonds publics un remède universel. Le fiasco de l’usine Gaspésia n’est-il pas la preuve éloquente que l’argent n’est pas la solution miracle?

Les véritables causes

Plutôt que de délier sans compter les cordons de leur bourse, les candidats auraient tout intérêt à s’interroger sur les véritables causes des problèmes que rencontre le Québec. Les solutions logiques et efficaces n’en seront que plus faciles à identifier.

Ils pourraient, par exemple, tenter de comprendre pourquoi les jeunes boudent l’industrie laitière. Ils découvriraient alors que ce n’est pas le manque d’intérêt qui décourage la relève, mais bien le fait qu’elle doive débourser près de 1,5 million $ simplement pour acheter des quotas laitiers, lesquels sont le produit du système de gestion de l’offre présentée par le passé comme étant une politique d’aide aux agriculteurs! Ce n’est pas de fonds dont le secteur agricole a besoin, mais plutôt d’un gouvernement qui cessera d’être un handicap!

Dans le domaine de la santé, l’histoire a montré que l’injection de millions n’améliore pas le système. Il est donc temps de se questionner sur le monopole de l’État dans ce domaine. Rien ne peut inciter un monopole à être plus efficace, et le secteur hospitalier ne fait pas exception. Le problème fondamental de la sous-performance du réseau de la santé est l’absence de concurrence, et lui allouer des sommes supplémentaires n’y changera rien!

Quant aux difficultés d’accès à la propriété, un prêt sans intérêt, réservé aux familles avec enfants de moins de 6 ans, est une mesure insipide. Au lieu de vider les poches des contribuables pour ensuite leur accorder une aide minable, les candidats devraient plutôt envisager une sérieuse refonte du système fiscal et comprendre que les travailleurs faiblement taxés réclament peu d’aide gouvernementale.

Un véritable leader

Il serait rafraîchissant de voir les candidats se questionner sur les véritables causes des problèmes soulevés précédemment. Promettre des enveloppes budgétaires est la solution facile. Un véritable leader, capable de grands changements, ne se contente pas d’un remède passe-partout: il cherche l’origine des maux et adopte la meilleure thérapie possible.

Messieurs les candidats, auriez-vous l’obligeance de cesser de dilapider l’argent des contribuables en mesures stériles pour enfin partir en quête de solutions efficaces? Les Québécois le méritent bien!

* Cette chronique a aussi été publiée dans Le Journal de Québec.

Nathalie Elgrably est économiste à l’Institut économique de Montréal et auteure du livre La face cachée des politiques publiques.

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