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Textes d'opinion

Pas besoin d’une politique alimentaire au Canada: laissons l’innovation se poursuivre

La plupart des gens ne se demandent sans doute pas comment, tous les jours, la nourriture se rend jusqu’à leur table. Pourtant, il s’agit d’un véritable miracle économique et logistique.

L’économiste Frédéric Bastiat observait, il y a près de 200 ans déjà, que les habitants de Paris dépendaient du reste de la France pour la majorité de leur subsistance, et qu’ils s’endormaient néanmoins paisiblement chaque soir sans avoir en tête la perspective qu’ils mourront de faim tous si ces approvisionnements de toute sorte cessaient. Selon Bastiat, la clé de cet exploit étonnant était le principe de la liberté des transactions, qui chaque jour amène ce «qu’il faut, rien de plus, rien de moins, sur ce gigantesque marché».

C’est encore vrai aujourd’hui, et le choix que vous offre chaque jour votre supermarché local en témoigne. Les merveilles d’un libre marché de la nourriture tel que décrit par Bastiat ont depuis été étendues — bien qu’imparfaitement — à toutes les parties du monde. De plus en plus d’individus ont accès à des milliers de produits provenant des quatre coins de la planète. Nous avons de plus en plus de choix, à des prix toujours plus bas.

Malgré ce succès indéniable et les résultats médiocres de la planification étatique à travers l’histoire, les appels à une plus grande implication du gouvernement dans la production, la réglementation et la distribution de la nourriture n’ont jamais cessé. Au Canada, le gouvernement fédéral a récemment demandé au ministère de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire de développer une politique alimentaire pour le pays, à travers un long processus de consultations. Le rapport qui en est issu contient 21 recommandations floues qui demandent pour la plupart une plus grande intervention du gouvernement sur les marchés alimentaires.

Le leurre du local

On appelle par exemple à un plus grand soutien de l’État au «développement et à la croissance de l’agriculture régionale et locale». Ceux qui souhaitent une telle politique ne comprennent pas que ce sont des intermédiaires efficaces et les signaux de prix relayés par les producteurs, les transformateurs et les détaillants — tous privés — qui, historiquement, ont engendré le développement de spécialisations régionales et permis des économies d’échelle à toutes les étapes de la production alimentaire, en plus de nous fournir des aliments dont la qualité s’améliore constamment.

Un retour à une alimentation locale ne peut que générer des prix plus élevés (perte des économies d’échelle) ou une offre plus faible (essayez de trouver des oranges du Québec en épicerie). Bien sûr, cela ne veut pas dire qu’une production locale ne peut pas trouver un marché de niche parmi des consommateurs les plus aisés. Il reste que forcer le recours à une agriculture locale réduirait probablement le pouvoir d’achat des autres consommateurs et n’aiderait pas une famille à se nourrir.

L’innovation, mieux que la politique

En fait, plusieurs objectifs des avocats d’une politique nationale, comme la traçabilité des produits et la réduction du gaspillage, sont déjà en train d’être atteints grâce aux innovations récentes qu’un marché libre a encouragées. Pourquoi? Parce que les premiers intéressés à vous offrir de la qualité sont ceux qui se battent chaque jour pour que vous n’alliez pas chez le concurrent, et parce que la nourriture jetée mange d’abord les profits des détaillants!

Par exemple, la technologie de la chaîne de blocs (blockchain) fournira aux consommateurs beaucoup plus d’informations sur l’historique d’un produit grâce à la numérisation d’un code QR. Elle permettra aussi de réduire davantage les déchets et de suivre les produits contaminés ou mal étiquetés de manière encore plus efficace. Walmart, un champion de la logistique, a récemment testé la technologie de la chaîne de blocs sur ses mangues. L’entreprise a été capable de les localiser et de fournir toutes les informations souhaitées en deux secondes, comparativement à presque une semaine actuellement.

N’en déplaise aux activistes, notre chaîne d’approvisionnement alimentaire moderne s’est construite progressivement, à coups d’essais et d’erreurs bien sûr, mais sans qu’une autorité unique en soit responsable, et n’aurait probablement pas évolué autant si cela avait été le cas. Le Canada n’a pas besoin d’une politique alimentaire nationale, il n’a qu’à laisser l’innovation spontanée que l’on connait depuis plus de 100 ans se poursuivre chaque jour.

Jasmin Guénette est vice-président aux opérations de l’IEDM, Pierre Desrochers est chercheur associé à l’IEDM, et Kevin Brookes est analyste en politiques publiques à l’IEDM. Ces derniers sont les auteurs de « Le miracle des supermarchés – La perspective de l’école autrichienne d’économie » et signent ce texte à titre personnel.

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