Garderies et subventions : vous allez encore payer !
Chers parents,
Si certains se réjouissent de la décision du gouvernement fédéral d’aller de l’avant avec une injection de quelque 7,5 milliards au cours des onze prochaines années dans un réseau national de garderies, je suis désolée de casser le party mais ce n’est pas une bonne nouvelle pour vous, parents et contribuables.
Tout d’abord, avant d’entrer dans le vif du sujet concernant nos services de garde, il faut soulever un point important qui a malheureusement été passé sous silence. La notion de champ de compétence. Encore une fois, Ottawa se met le nez dans un domaine de compétence provinciale. Les provinces sont les mieux placées pour adopter les meilleures pratiques sur le plan des services sociaux en raison de leur proximité avec leurs citoyens. Le fédéral ne doit pas s’ingérer dans ce qui ne le concerne pas et imposer ses priorités.
Il n’y a qu’à regarder ce qui se passe en santé. La taille du Transfert canadien en matière de santé a augmenté de 50 % en 10 ans, pour atteindre 35 milliards de dollars cette année. Autrement dit, les montants versés par Ottawa ont augmenté plus vite que l’ensemble des dépenses en santé des provinces et territoires. Et pourtant, les provinces en veulent toujours plus et la chicane est toujours pognée !
N’est-ce pas le même modèle qu’Ottawa est en train de reproduire avec sa nouvelle politique familiale? Pourquoi s’embarquer dans une réforme qui va sans doute encore une fois coûter très cher aux contribuables et aux parents?
Si les provinces souhaitent quand même aller de l’avant et accueillir l’argent d’Ottawa, elles ne devraient surtout pas s’inspirer du modèle québécois des CPE, même si celui-ci est souvent cité en exemple.
Premièrement, au Québec, le réseau des CPE représente moins du tiers des places occupées (94 000 sur un total de 293 000). C’est la partie privée du réseau, subventionnée et non subventionnée, qui fournit le plus grand nombre de places, avec près de 200 000 en tout.
Deuxièmement, les dépenses annuelles pour les places subventionnées sont passées de quelque 300 millions de dollars en 1997-1998 à 2,4 milliards de dollars en 2016-2017. Cela dépasse de loin l'augmentation du nombre de places prévues. Même en tenant compte de l'inflation, le coût par enfant a plus que doublé.
En fait, les places en CPE coûtent beaucoup plus cher ! En 2014, le ministère des Finances évaluait le coût annuel à près de 14 000 $ par enfant alors que le coût d’une place en garderie privée subventionnée se situait autour de 11 000 $, celle en milieu familial autour de 7200 $, et ce en plus de la contribution quotidienne des parents.
Troisièmement, non seulement ce système a-t-il entraîné une explosion des coûts, mais il y a encore des parents qui languissent sur les listes d’attentes, même 20 ans après la mise en place du réseau. Un vrai système universel fournirait un montant pour chaque enfant et permettrait aux parents d’aller vers l’établissement de leur choix. Et ces établissements seraient toujours soumis à des normes de qualité imposées par le gouvernement.
Le gouvernement du Québec a commis une erreur il y a 20 ans, lorsqu'il a décidé de subventionner le système de garderies plutôt que les parents directement. Ces derniers en payent toujours le prix avec des coûts de système en hausse, des listes d’attente et des grèves.
Les provinces, dont le Québec, doivent tenir compte de ces faits lorsqu’elles recevront d'importantes sommes du gouvernement fédéral. Il est temps de penser à nous, les parents, et à nos enfants.
Ah oui, une dernière petite chose. Je crains que nous ne puissions plus réclamer les frais de services de garde lors de notre prochaine déclaration d’impôt, vu que le service sera subventionné. Ottawa risque d’imiter Québec et nous n’échapperons pas à la double imposition.
Morale de l’histoire : il n’y a rien de gratuit et le contribuable finit toujours par payer la note.
Amitiés,
Pascale Déry
Pascale Déry est conseillère principale, communications, département des actualités, à l'IEDM. Elle signe ce texte à titre personnel.
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