Quand nos gouvernements imitent les mauvaises politiques d’ailleurs
L'État de la Californie a récemment relevé de 18 à 21 ans l'âge minimum pour acheter du tabac.
Ici au Canada, plusieurs applaudissent et veulent voir le gouvernement s'inspirer d'une telle initiative. La Société canadienne du cancer notamment, par la bouche de son analyste principal, s'est montrée « intéressée » par l'initiative californienne.
En fait, divers lobbies et agences gouvernementales cherchent constamment de nouvelles réglementations à imposer aux industries, que ce soit celle du tabac, des voitures ou de l'hébergement, pour ne nommer que celles-là.
Prenons l'exemple du paquet de cigarettes neutre, une mesure qui fait du chemin. D'ailleurs, le gouvernement fédéral, appuyé par toute une industrie de lobby antitabac, souhaite s'inspirer du modèle de l'Australie et du Royaume-Uni. Ainsi, les paquets canadiens devraient arborer la même couleur peu attrayante, avoir la même forme et être exempts de tout logo. Seule la marque permettrait de distinguer les paquets, mais le lettrage serait standardisé.
Au moins deux problèmes se posent avec une telle politique. D'abord, il faut savoir que les effets sur le taux de tabagisme ne sont pas très concluants. Certaines études affirment que le paquet neutre fait diminuer la consommation de tabac alors que d'autres soutiennent le contraire.
Deuxièmement, d'un point de vue économique et même juridique, il s'agit d'une atteinte directe au droit de propriété. Un logo et un lettrage distincts font partie de la propriété intellectuelle d'une entreprise. Ainsi, cette mesure enfreint les droits élémentaires d'une entreprise et de ses actionnaires, sans offrir une quelconque compensation.
Imaginez si le gouvernement forçait les constructeurs automobiles à ne fabriquer que des voitures brunes et qu'aucune d'elles n'auraient le droit d'utiliser les appellations « sport », « touring » ou autres, dans l'objectif de faire diminuer les accidents de la route. Est-ce que ça vous semblerait justifié?
Imaginez si les emballages de soupes au poulet et nouilles vendues à l'épicerie devaient tous être de couleur grise avec le dessin d'une grosse pierre aux reins sur l'étiquette pour aviser le consommateur que le sel peut, dans certains cas, causer des calculs rénaux. Est-ce que ça vous semblerait justifié?
Je suis pas mal certain que vous trouveriez cela abusif. Rappelez-vous, vous n'avez droit à aucune compensation financière, même si le gouvernement vous empêche d'utiliser votre propre logo, votre image de marque.
Ce n'est pas la première fois que les groupes de pression et gouvernements s'inspirent de ce qui se fait ailleurs afin de mettre en place des politiques publiques limitant les libertés individuelles et économiques.
Outre le tabac, il y a la taxation des nuits louées sur Airbnb. Québec veut imiter San Francisco, où la compagnie doit maintenant percevoir une taxe de 14 % pour la location d'un appartement ou une maison.
Pour le marché du carbone, le Québec s'est inspiré de la Californie. Résultats : une taxe déguisée qui n'a fait qu'entraîner une hausse des prix à la pompe pour les automobilistes québécois.
Même principe pour les voitures électriques. Le gouvernement souhaite imiter la Californie en incitant les constructeurs automobiles à offrir des véhicules plus accessibles aux consommateurs. Résultat : on subventionne à coups de millions une industrie qui, dans les faits, a très peu d'impact sur la réduction des gaz à effet de serre.
Rappelez-vous aussi du projet de loi du Parti québécois, inspiré par une loi française, qui visait à instaurer un prix unique du livre au Québec. L'Institut économique de Montréal (IEDM) avait d'ailleurs publié une Note économique à ce sujet afin de mettre en lumière les conséquences négatives d'une telle politique.
Autre exemple : celui du revenu minimum garanti. Ici, ce n'est pas la Californie ou la France qui sert d'inspiration, mais bien la Finlande.
Nos gouvernements ont cette fâcheuse tendance à imiter les autres pour des politiques publiques dont l'efficacité reste dans la plupart des cas à démontrer. Des politiques qui coûtent cher, qui accentuent le pouvoir et l'importance des groupes d'intérêt, tout cela au détriment des consommateurs, contribuables ou entrepreneurs.
Le Québec a déjà son lot de politiques inefficaces et coûteuses. Pas besoin de s'empresser pour imiter les erreurs de nos voisins! Adoptons une politique pour son efficacité et son rapport coût-bénéfice, pas parce que les autres le font et encore moins pour plaire à des groupes de pression.
Jasmin Guénette est vice-président de l'Institut économique de Montréal. Il signe ce texte à titre personnel.