Bilan de la crise économique : la création d’emplois naturelle du secteur privé dépasse de loin l’impact allégué des plans de relance
Montréal, 8 décembre 2009 – À quelques jours des consultations prébudgétaires du ministre des Finances du Canada, Jim Flaherty, qui auront lieu à Québec, l’Institut économique de Montréal (IEDM) publie un cahier de recherche traitant de la crise qui a débuté en 2007. Celui-ci montre notamment que les effets positifs sur l’emploi que l’on attribue aux plans de relance, fondés sur des dépenses gouvernementales, sont mineurs comparativement à la création d’emplois naturelle du secteur privé. Ce constat devrait encourager le ministre des Finances à persister dans son intention de ne pas engager de nouvelles dépenses publiques dans son prochain budget.
L’étude réalisée par Marcel Boyer, économiste principal à l’IEDM et professeur émérite de sciences économiques à l’Université de Montréal, analyse en particulier le marché du travail américain à partir de données du Bureau of Labor Statistics. L’auteur explique que malgré les nombreux emplois perdus pendant la récession, des millions d’emplois ont aussi été créés dans le secteur privé américain lors de ces mois difficiles. En effet, plus de sept millions d’emplois ont été créés en moyenne par trimestre, pour les quatre derniers trimestres disponibles au moment de la préparation de l’étude (du quatrième trimestre de 2007 au troisième trimestre de 2008).
«Quand on compare ces données avec le nombre d’emplois créés ou sauvegardés par le plan de relance du gouvernement américain, qui selon la Maison Blanche se chiffrerait après deux trimestres à environ 650 000, on ne peut que constater la relative insignifiance de ce nombre par rapport à la création brute d’emplois dans le secteur privé. De plus, plusieurs intervenants suggèrent que cette estimation des effets du plan de relance est généreuse, car les règles pour calculer les emplois sont plutôt nébuleuses et favorisent une surestimation des emplois prétendument créés ou sauvegardés», souligne le chercheur. Rappelons que le coût des mesures adoptées en février 2009 par le Congrès américain est estimé à 787 milliards de dollars. La semaine dernière, le président Obama a convoqué un «sommet sur l’emploi» pour trouver des solutions visant à contrer un taux de chômage qui dépasse les 10 % aux États-Unis.
Par ailleurs, si pendant les périodes de croissance davantage d’emplois sont créés que perdus, des millions d’emplois disparaissent tout de même chaque trimestre. Pour les 65 trimestres allant du troisième trimestre de 1992 au troisième trimestre de 2008, chaque emploi net créé provenait en réalité de 21 emplois créés et de 20 emplois perdus, ce qui a mené à une forte croissance du marché du travail aux États-Unis. Parallèlement, chaque nouvel établissement ouvert par les entreprises privées américaines au net découlait en fait de 19 ouvertures et de 18 fermetures. Les économistes appellent ce processus la «destruction créatrice».
«On oublie souvent que les données sur la création et les pertes d’emplois que nous lisons dans les journaux sont exprimées sur une base nette. Quand on évalue la dynamique des emplois et des établissements créés et perdus en termes bruts, le portrait de la crise économique prend un tout autre visage. Malgré les pertes d’emplois nettes importantes des derniers trimestres, il reste que le secteur privé de l’économie américaine a continué à créer un nombre brut d’emplois très élevé», remarque M. Boyer.
M. Boyer rappelle qu’en réaction à la récession, les gouvernements ont gonflé leurs déficits pour tenter de stimuler l’économie. Il considère cependant que les effets bénéfiques présumés de ces politiques de «plans de relance» n’arrivent habituellement que trop tard. Qui plus est, le caractère improvisé du bouquet des mesures proposées risque également de générer beaucoup de gaspillage et des incitations néfastes en amenant les entreprises à s’occuper davantage de leurs représentants politiques que de leurs marchés.
Il conclut qu’en temps de récession comme en temps de croissance, une stratégie de déficit budgétaire, de protectionnisme et de subventions à tout vent ne peut que faire plus de mal que de bien. «Les déficits devront d’une manière ou d’une autre être financés et éventuellement remboursés. De plus, ils consomment des ressources réelles importantes qui sont canalisées dans des programmes dont la rentabilité n’existe souvent que sur papier. Les gouvernements devraient concentrer leurs efforts sur le rétablissement de la confiance des consommateurs et des investisseurs et sur le développement des conditions favorables au bon fonctionnement des marchés, plutôt qu’intervenir directement au sein de l’économie.»
Michel Kelly-Gagnon, président-directeur général de l’IEDM, ajoute que «l’élimination des déficits gouvernementaux chroniques au milieu des années 1990 a permis au Canada d’améliorer sa situation économique par rapport à celle des autres pays développés. Compte tenu des effets discutables des plans de relance et de leur coût important, le gouvernement fédéral devrait s’engager fermement à ne pas les bonifier et à se concentrer sur le retour à l’équilibre budgétaire et sur l’allégement général du fardeau fiscal. Il s’agit des recettes les plus éprouvées pour qu’une économie retrouve une santé durable».
Le texte intégral du Cahier de recherche publié aujourd’hui, qui s’intitule La crise économique et ses conséquences sur l’emploi peut être consulté sans frais au www.iedm.org.
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L’Institut économique de Montréal est un organisme de recherche et d’éducation indépendant, non partisan et sans but lucratif. Par ses études et ses conférences, l’IEDM alimente les débats sur les politiques publiques au Québec et au Canada en proposant des réformes créatrices de richesse et fondées sur des mécanismes de marché.
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