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Textes d'opinion

Chronique optimiste

À l’aube de la nouvelle année, nous sommes tous friands de prévisions. Inconsciemment ou non, nous recherchons à être rassurés quant à ce que l’avenir nous réserve aux niveaux économique, politique, social, environnemental, etc. Ce réflexe est compréhensible: l’être humain a peur de l’inconnu.

Se perdre en conjectures est toutefois un exercice futile. D’abord parce que la vie est ponctuée d’événements imprévisibles qui peuvent instantanément et radicalement changer la donne et rendre ridicules des prévisions jusque-là logiques. Mais surtout, parce que rien ne rend plus optimiste qu’un bilan du chemin parcouru jusqu’ici.

Certes, la crise économique semble s’éterniser, les finances publiques sont en décrépitude, le fardeau fiscal s’alourdit, les scandales de corruption éclatent, Haïti peine à se relever de son terrible séisme, les dégâts de la marée noire prendront des années à être réparés, et l’économie européenne vacille. On serait tenté de conclure que tout va mal, mais ce serait une erreur. Quand on prend du recul et qu’on évalue les progrès accomplis au cours des siècles, on réalise alors que, malgré tout, nous vivons à la meilleure époque de l’histoire de l’humanité.

Il fut un temps où la plomberie intérieure et les égouts n’existaient pas. Il fallait choisir entre le pot de chambre ou un endroit discret dans la cour arrière. Les femmes transportaient annuellement 38,000 litres d’eau pour les travaux ménagers, la cuisine et l’hygiène personnelle de leurs familles. On ne connaissait ni les antibiotiques ni les anesthésies et les équipements chirurgicaux faisaient l’effet d’instruments de torture. Le voyage entre Boston et San Francisco prenait 6 mois, sans parler des conditions dans lesquelles on voyageait. Même une visite au magasin du village situé à moins de 15 km nécessitait une journée entière! En 1800, l’information circulait grâce à des messagers qui se déplaçaient à cheval. En 1900, le téléphone faisait son apparition, mais seule l’élite pouvait se l’offrir. Les interurbains étaient inabordables et souvent inaudibles. L’espérance de vie était de 50 ans. Les jeunes commençaient à travailler dans les usines à 13 ans, et au rythme de 70 heures par semaine jusqu’à leur mort. La retraite n’existait pas. Les femmes consacraient en moyenne 58 heures par semaine aux travaux ménagers. En 1958, il fallait travailler 136 heures au taux horaire moyen pour s’offrir un téléviseur de 24 pouces (noir et blanc). Aujourd’hui, avec moins de 20 heures de travail on achète une télé Samsung LCD de 32 pouces!

Évidemment, la pauvreté persiste dans certaines régions du globe. Mais là encore, les nouvelles sont encourageantes. On apprenait récemment que la classe moyenne mondiale a triplé en 10 ans. Le Chili a intégré l’OCDE. La Chine, l’Inde, l’Indonésie et le Brésil, qui représentent ensemble 40 % de la population mondiale, connaissent une croissance rapide et soutenue. Plusieurs pays asiatiques, comme Hong Kong, Singapour, Taiwan et la Malaisie étaient parmi les plus pauvres de la planète il y a une cinquantaine d’années. Ils font aujourd’hui partie des plus riches! La situation s’améliore même en Afrique où l’accès à l’eau, à l’électricité et à des installations sanitaires est en progression.

Il est nécessaire de poursuivre la guerre à la pauvreté, et il est légitime de s’inquiéter de la situation économique actuelle. Mais il ne faut pas perdre de vue le fait que notre vie est infiniment plus facile que celle de nos ancêtres. Nous avons réalisé de formidables progrès, et nous en réaliserons d’autres. La conjoncture actuelle n’est qu’un revers temporaire. L’histoire l’a prouvé : l’optimisme est de rigueur!

Bonne et heureuse année, chers lecteurs!

Nathalie Elgrably-Lévy est économiste senior à l’Institut économique de Montréal.

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