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Événement

Universal Private Choice: Medicare Plus – A concept of health care with quality, access and choice for all Canadians

LE COMITÉ SÉNATORIAL PERMANENT DES AFFAIRES
SOCIALES, DE LA SCIENCE ET DE LA TECHNOLOGIE

TÉMOIGNAGES

MONTRÉAL, le mercredi 31 octobre 2001 (séance de l’après-midi)

Le sénateur Michael Kirby (président) occupe le fauteuil.

Sénateur
Michael Kirby (Président): Chers collègues, nos prochains
témoins sont de l’Institut Économique de Montréal.
Il s’agit de M. Edwin Coffey, qui est l’ex-président de l’Association
médicale du Québec, et de M. Michel Kelly-Gagnon, qui est
directeur exécutif de l’Institut. 

  

Merci d’être
venus témoigner.
 

  

[français] 

  

M. Michel
Kelly-Gagnon, directeur exécutif, Institut économique de
Montréal:
Merci d’avoir accepté de nous entendre, nous
en sommes honorés. Je suis directeur exécutif de l’Institut
économique de Montréal. L’Institut économique de Montréal
est un «think tank» privé et indépendant qui
se veut le pendant québécois du C.D. Howe Institute, ou autre
organisme semblable.
 

  

Nous avons
débuté nos opérations le 1er juin 1999, et opérons
sur la base d’un budget annuel d’environ 500 000 $. Pour ceux
qui sont intéressés à en savoir davantage sur l’Institut
économique de Montréal, je vous réfère au dépliant
corporatif bleu qui vous a probablement été distribué.
 

  

Avant de présenter
le docteur Coffey et de lui céder la parole, je voudrais partager
avec vous une brève observation, toute simple, mais qui me semble
quand même cruciale. Je suis certain que vous êtes au courant
de cette observation de gens aussi distingués et connaissants que
vous. Cependant, parfois il est bon de marquer, avec un marqueur jaune
ou avec un crayon rouge, certains éléments clés, afin
que lorsque votre rapport sera rendu public on puisse permettre à
la population canadienne d’être exposée à cette distinction.
 

  

Si nous voulons
avoir un débat rationnel et constructif concernant une éventuelle
réforme du système de santé, il faut absolument apprendre
à faire la distinction entre deux choses bien distinctes, soit d’une
part, un monopole étatique sur l’assurance et la production des
soins de santé au Canada et, d’autre part, l’universalité
des soins de santé. J’utilise ici ce terme non dans un sens technique
ou juridique, mais pour me référer au principe selon lequel
tous les Canadiens, nonobstant leur niveau de revenus, ont accès
à un panier raisonnable de soins et de services de santé
de qualité, à l’intérieur d’un délai raisonnable.
 

  

Je fais cette
remarque parce que depuis que j’observe le débat sur la question,
j’observe qu’il y a différents groupes, différentes personnes
et différents partis politiques qui entretiennent constamment la
confusion entre les deux. Il peut y avoir peut-être des mérites
pour les deux pensées. Ce sont deux principes distincts: le monopole
d’état c’est une chose, l’universalité des soins de santé,
une autre.
 

  

D’ailleurs
l’expérience de la très grandes majorité des pays
de l’OCDE nous prouve le point que je vous souligne, c’est-à-dire
que des pays comme la France ou l’Allemagne ont une universalité
des soins de santé, sans avoir un monopole tel que nous le connaissons.
Et si le rapport mettait bien clairement en relief cet aspect pour qu’à
l’avenir tout le monde fasse la distinction, ce serait déjà
une grande oeuvre que vous auriez accomplie.
 

  

Sans plus tarder,
il m’est agréable de vous présenter le docteur Edwin Coffey.
 

  

[traduction] 

  

M. Coffey est
attaché de recherches à l’Institut Économique de Montréal,
professeur adjoint retraité de la Faculté de médecine
de l’université McGill, et aussi coauteur d’une de nos publications
intitulée Universel
Private Choice
, dont nous nous sommes inspirés pour la rédaction
de notre mémoire. Je pense que nous vous en avons transmis quelques
exemplaires. Sinon, nous pouvons vous en faire parvenir quelques-uns en
français et en anglais.
 

  

M. Edwin
Coffey, attaché de recherches, Institut Économique de Montréal:

Premièrement, je tiens à vous remercier de nous avoir invités
à vous communiquer nos observations et nos suggestions concernant
l’état du système de soins de santé du Canada, ainsi
que les rôles et les objectifs de l’administration fédérale
dans la réforme des soins de santé, telle qu’elle a été
proposée par votre comité.
 

  

Plutôt
que de débiter la litanie habituelle des problèmes et des
pénuries que l’on connaît dans le système, nous nous
concentrerons sur les possibilités d’actions et les suggestions
qui permettraient d’améliorer le contexte législatif et économique
dans lequel évolue le système de soins de santé du
Canada. Ces améliorations et ces modernisations permettraient et
favoriseraient l’adoption de méthodes pluralistes et nouvelles d’assurer
le financement public et privé et d’offrir de l’assurance et la
prestation de services médicaux et hospitaliers. Nous considérons
qu’il s’agit de la meilleure approche pour atteindre les buts et les objectifs
découlant des cinq premiers rôles de l’administration fédérale
dans le domaine des soins de santé que vous décrivez dans
votre rapport intérimaire sur les questions et les options.
 

  

De façon
générale, nous approuvons ces rôles et ces objectifs,
à quelques exceptions près. Par exemple, en ce qui concerne
le rôle du financement, pour ce qui est du transfert de fonds pour
la prestation des services de santé, nous avons suggéré
une reformulation, un regroupement et une réduction des objectifs
de quatre à trois. Ainsi, on motiverait davantage les législateurs
à abroger les dispositions de leur législation relative à
l’assurance-maladie et hospitalisation qui actuellement interdisent d’avoir
recours à une autre forme d’assurance-maladie et à la sous-traitance
au secteur privé des services médicaux dans les hôpitaux.
 

  

Dans la même
section, nous suggérons de faire la promotion d’une réforme
durable et d’un renouvellement des régimes publics, privés,
et mixtes publics et privés de soins de santé et d’assurance-maladie.
On assurerait ainsi une meilleure qualité, un meilleur accès
et le libre choix des services de santé plutôt que de simplement
fournir un financement stable du statu quo, qui ne garantit pas nécessairement
la durabilité ni ne favorise la réforme et le renouvellement.
 

  

En ce qui concerne
le rôle de l’infrastructure, nous avons suggéré une
reformulation de l’objectif final ayant trait à la planification
des ressources humaines. Ainsi, on inciterait les provinces et les territoires
à éliminer les restrictions déraisonnables sur la
libre circulation et la situation des médecins et du personnel connexe,
et on encouragerait les provinces à avoir moins recours aux pratiques
dépassées que sont la planification centrale et la sociologie
appliquée.
 

  

Enfin, nous
aimerions attirer votre attention sur un document que vient de publier
l’Institut Économique de Montréal qui est une proposition
de réforme du régime de santé au Canada, intitulé
«Universal
Private Choice: Medicare Plus, A concept of health care with quality, access
and choice for all Canadians
». Cette approche de l’accessibilité
universelle obtenue au moyen de régimes parallèles publics
et privés de soins de santé et d’assurance-maladie est assez
semblable à celle retenue par les Européens. J’avais au départ
écrit «curieusement», mais je l’ai biffé. Cette
proposition est compatible avec la plupart des objectifs de votre comité.
Elle n’a toutefois pas fait l’objet d’essais pratiques rigoureux et d’une
évaluation en fonction des critères suggérés
pour les projets pilotes réalisés en fonction des exigences
fédérales en matière de recherche et d’évaluation.
 

  

Voilà
qui clôt mes remarques préliminaires, et nous sommes prêts
à répondre à vos questions.
 

  

Le président:
J’ai une question sur votre dernier point. Est-ce que le projet pilote
dont vous parlez n’enfreindrait pas les principes de la Loi canadienne
sur la santé dans leur version actuelle? Les projets pilotes visant
la réforme des soins primaires auxquels les gouvernements fédéral
et provinciaux ont consenti il y a un peu plus d’un an étaient tous
conformes à la Loi canadienne sur la santé.
 

  

M. Coffey:
Oui.
 

  

Le président:
Le type de projet pilote que vous suggérez nécessite un changement
parce qu’il se situe en dehors des dispositions de la Loi canadienne sur
la santé.
 

  

M. Coffey:
Oui.
 

  

Le président:
Malheureusement, la Loi canadienne sur la santé ne donne pas au
ministre le droit de laisser certaines choses s’accomplir malgré
les dispositions de la loi, même sur une base expérimentale,
autrement dit, non pas de changer la loi, mais de pouvoir dire: «Voici
une nouvelle approche de la prestation. Essayons-la, même si elle
enfreint la Loi canadienne sur la santé. Nous allons l’essayer seulement
à titre de projet pilote.» Le ministre ne dispose pas de la
latitude nécessaire pour permettre la tenue de ces projets pilotes.
Je ne dis pas qu’il ne devrait pas disposer de cette latitude, j’affirme
seulement qu’il ne l’a pas. Pour pouvoir essayer le genre de projet dont
vous parlez, il faudrait que l’on dispose de cette marge de manoeuvre,
n’est-ce pas?
 

  

M. Coffey:
C’est exact. Nous devrions faire ce que tous les autres pays du monde essaient
de faire depuis 40 ans, c’est-à-dire expérimenter avec le
financement des régimes de santé.
 

  

Le président:
Tout à fait.
 

  

M. Coffey:
Malheureusement, depuis l’adoption de la Loi canadienne sur la santé,
nous n’avons réalisé aucune expérimentation dans le
domaine du régime de santé au Canada.
 

  

Le président:
Une expérimentation avec le financement du régime de santé?
 

  

M. Coffey:
Avec le financement, oui.
 

  

Le président:
C’était impossible. Avant 1984, vous pouviez expérimenter.
Vous auriez pu le faire à cette époque.
 

  

M. Coffey:
Et bien, pas au Québec.
 

  

Le président:
Non, vous ne le pouviez pas. Quoi qu’il en soit, vous ne pouvez pas le
faire à cause de la Loi canadienne sur la santé.
 

  

M. Coffey:
C’est exact.
 

  

Le président:
Tout ce que je dis, c’est que les gens ont commencé à faire
des essais vers la fin des années 70 et au début des années
80.
 

  

M. Coffey:
Oui. Je suppose que nous pourrions dire que l’on tente d’appliquer un modèle
expérimental en Alberta, si on arrive à le faire progresser.
 

  

Le président:
Justement, à ce sujet — et je regarde le sénateur Morin
et le sénateur Keon en disant ceci — lorsque nous avons fait notre
tournée dans l’Ouest, nous avons entendu des témoins qui
exploitent des cliniques privées au Manitoba, en Alberta et en Colombie-Britannique.
Les gens du Manitoba et de la Colombie-Britannique ont déclaré
que le dernier endroit où ils songeraient à ouvrir une clinique
privée serait l’Alberta à cause du fameux projet de loi 11.
Ce projet restreint leurs options.
 

  

M. Coffey:
C’est tout à fait vrai.
 

  

Le président:
De fait, ils ont déclaré que les choses sont encore pires
que si le projet de loi 11 n’avait jamais été présenté.
 

  

M. Coffey:
Oui. Terre-Neuve serait l’endroit idéal.
 

  

Le président:
Pour quelle raison?
 

  

M. Coffey:
Parce qu’entre autres choses, la province n’a aucune interdiction à
l’égard de l’assurance-maladie privée.
 

  

Le président:
Est-ce la seule province?
 

  

M. Coffey:
Non, six provinces interdisent l’assurance-maladie privée. À
Terre-Neuve, je pense que même les médecins ayant choisi d’adhérer
au régime provincial peuvent toujours décider de se retirer
du programme à titre individuel, si leurs patients et eux-mêmes
le désirent. Malheureusement, étant donné la situation
économique, il y a très peu de demandes en vue d’obtenir
des services privés.
 

  

Le président:
Autrement dit, le choix existe, mais personne ne peut s’en prévaloir,
c’est bien cela?
 

  

M. Coffey:
En quelque sorte, oui.
 

  

Le sénateur
Morin:
J’aimerais revenir au concept du payeur unique auquel vous avez
fait allusion tout à l’heure. Ne pensez-vous pas qu’en optant pour
un modèle à plusieurs payeurs on risque d’accroître
la complexité et les coûts du système? L’un des principaux
problèmes pour les fournisseurs aux États-Unis, où
il existe un grand nombre de compagnies d’assurance, consiste à
devoir traiter avec divers régimes d’assurance et c’est ce qui contribue
à hausser les frais d’administration et à accroître
la complexité. Quelle est votre opinion à ce sujet?
 

 

M. Coffey:
Voici, bien entendu, la raison pour laquelle il faut faire des expériences
avec des régimes comportant de nombreux fournisseurs et de nombreux
payeurs. Nous ne disposons pas d’éléments probants au Canada
pour répondre correctement à cette question. En Europe, où
l’on est en présence de nombreux fournisseurs, de nombreux payeurs
et de régimes parallèles publics et privés, le modèle
semble fonctionner. La concurrence est un important facteur de nivellement
des frais d’administration et ainsi de suite. S’il existait une concurrence
entre les régimes de santé, les régimes d’assurance-maladie
et même les hôpitaux, il faudrait que la gestion soit efficace.
Ce serait particulièrement vrai si le financement, à la fois
public et privé, venait du patient plutôt que des autorités
en matière de soins de santé.
 

  

Le sénateur
Morin:
On a dit qu’une proportion de 75 p. 100 du régime de
prestation des soins de santé dans un pays donné est historique,
et la raison pour laquelle tous ces pays ont des régimes d’assurance
privés et des systèmes de prestation des soins privés
est historique. Par exemple, en Grande-Bretagne, lorsque le régime
a été mis en place, les médecins ont manifesté
passablement d’opposition, de même que les Britanniques des «classes
supérieures» — dans ce pays, on est beaucoup plus soucieux
des barrières entre les classes que nous le sommes — aussi, pour
calmer le jeu, on a introduit l’assurance-maladie privée. Ce fut
un compromis historique.
 

  

M. Coffey:
Oui.
 

  

Le sénateur
Morin:
Apparemment, ce fut le cas dans la plupart des pays européens
où ces régimes ont été introduits. Au Canada,
nous n’avons pas de classe supérieure, je suppose — mais de toute
façon, la question n’a pas été soulevée. Il
semble que la raison principale soit historique et notre régime
national de soins de santé comporte lui aussi des fondements historiques.
On peut dire que c’est le régime de la Saskatchewan qui prévaut
au Canada.
 

  

Par conséquent,
je ne suis pas sûr que l’on doive s’aligner trop étroitement
sur ce qui se fait en Europe, parce que les justifications de départ
n’étaient pas d’ordre logique, mais relevaient plutôt d’un
choix rationnel. Il s’est donc agi davantage de trouver un compromis lorsque
ces scénarios de régimes de soins de santé sont arrivés.
 

  

M. Coffey:
Oui.
 

  

Le sénateur
Morin:
Avez-vous des commentaires à ce sujet?
 

  

M. Coffey:
Un projet intéressant que j’ai remarqué depuis un an à
peu près émane de la Suède — et je suppose que vous
vous y êtes arrêtés aussi — et particulièrement
à ce qui se fait à Stockholm. L’automne dernier, nous avons
tenu une conférence à Montréal, et les données
qui nous sont parvenues de l’expérience de Stockholm étaient
très révélatrices. Lorsque je suis tombé sur
ces renseignements, et c’est la première fois que je peux lire un
document écrit sur le sujet, j’ai été très
surpris.
 

  

Par exemple,
tous les syndicats d’infirmières de Stockholm ont formé des
sociétés privées et acceptent de travailler en sous-traitance
pour le gouvernement à titre de fournisseurs privés, et les
infirmières sont satisfaites. Leur moral est à la hausse,
leur productivité est à la hausse, et elles ne sont pas aussi
à cheval sur l’ancienneté. Si vous êtes très
efficace dans votre travail et que vous possédez un éventail
de compétences, votre rémunération monte d’un cran,
et ainsi de suite.
 

  

L’autre aspect
intéressant est que parmi les sept — je pense qu’il y en a sept
— gros hôpitaux de Stockholm, un a été vendu à
une société hospitalière privée, et au cours
des deux premières années, on a pu réduire les coûts
de 30 p. 100.
 

  

Le président:
Je pense que vous faites allusion à l’hôpital St. George.
 

  

M. Coffey:
Oui. C’est exact, je crois que l’on dit le Saint Goran en suédois?
Voici des chiffres qui comptent parmi les plus impressionnants que j’ai
jamais vus. Et ces résultats ont été obtenus à
partir de fonds publics, il s’agit d’un concept de marché interne,
de sorte que l’hôpital est financé par le secteur public,
mais il appartient à des intérêts privés et
est géré comme tel, et les services sont donnés en
sous-traitance à des exploitants du secteur privé. Les services
ambulanciers sont impartis, de même que les soins infirmiers, les
services de laboratoire, de diagnostics et même, bon nombre de médecins
se sont réunis en petits groupes et offrent leurs services en sous-traitance.
 

  

L’un de vos
collègues les plus âgés, dans le coin là-bas,
sera heureux d’entendre que le délai d’attente moyen pour une chirurgie
cardiaque dans les hôpitaux privés est actuellement de deux
semaines, par comparaison à 15 à 25 semaines dans les hôpitaux
du secteur public de la Suède. Ces hôpitaux se trouvent dans
les régions éloignées, où l’on est très
conservateur et où l’on tient encore beaucoup au statu quo du modèle
social-démocrate.
 

  

Le sénateur
Morin:
Ma dernière question est celle-ci: comment cet hôpital
est-il financé? D’où provient le financement de l’Hôpital
St. George?
 

  

M. Coffey:
Il se finance par l’entremise des patients qui amènent leur financement
avec eux.
 

  

Le sénateur
Morin:
Donc, l’argent suit les patients.
 

  

M. Coffey:
C’est cela, il s’agit de fonds publics, mais ils suivent les patients.
 

  

Le sénateur
Morin:
Ils ne proviennent pas nécessairement du secteur des
soins primaires ou encore d’un régime de soins privés? Il
n’est pas absolument nécessaire qu’ils aient été dirigés?
 

  

M. Coffey:
C’est ainsi que je le comprends.
 

  

M. Kelly-Gagnon:
Je me rappelle en effet d’avoir parlé à quelqu’un qui nous
mentionnait M. Johan Hjertqvist, le chercheur responsable de la conception
et de la réalisation de cette soi-disant «expérience
de Stockholm». Ce monsieur m’expliquait que l’équivalent chez
eux de notre «communauté urbaine», c’est-à-dire
les grandes agglomérations urbaines, disposent d’une certaine latitude
pour offrir des services suivant diverses formules, de sorte qu’il est
possible d’établir des comparaisons. En Suède, le gouvernement
fédéral impose des normes dont il surveille l’application,
mais la prestation s’effectue à ce qu’il est convenu d’appeler l’«échelon
municipal» — soit l’échelon d’une communauté urbaine.
Il me mentionnait que cet hôpital, le St. George ne permettait pas
la surfacturation, de sorte qu’il était impossible à quiconque
de passer devant tout le monde en payant un peu plus.
 

  

Par conséquent,
nous sommes toujours en présence d’un scénario passablement
social-démocrate, mais avec des caractéristiques différentes.
Ce type de scénario existe depuis deux ou trois ans, et je peux
dire qu’en 2002, notre institut a l’intention d’effectuer une étude
conjointe poussée avec un institut suédois afin de recueillir
des données sur cet essai, et des données très détaillées,
à savoir comment on procède dans ce type de projet. Il se
peut aussi que nous effectuions du travail sur le terrain et ainsi de suite,
parce que je pense que le public canadien est réticent avec raison
à l’égard de toute réforme importante. Nous avons
besoin de documentation et d’ouvrages de référence, mais
aussi d’effectuer du travail sur le terrain afin de vraiment surveiller
l’évolution des choses.
 

  

À mon
sens, il existe trois critères en fonction desquels envisager la
réforme. Il y a les résultats en termes de coûts, les
résultats en termes de ce que je qualifierais de «renforcement
de l’autonomie du patient» ou encore de liberté de choix du
patient, et les résultats sur la santé. Il arrive parfois
que les coûts diminuent et que les patients soient relativement heureux
de la situation, mais ils ignorent que les choix qu’ils ont faits auront
une incidence négative ou des conséquences néfastes
sur leur santé avec les années.
 

  

Si nous étions
capables de surveiller une réforme en fonction de ces trois critères,
qu’il s’agisse du plan de Stockholm ou de n’importe quel autre, alors nous
pourrions savoir si c’est la voie que le Canada doit emprunter.
 

  

Le sénateur
Keon:
Monsieur Coffey, j’aimerais poursuivre avec vous sur cette tangente
intéressante, c’est-à-dire, lorsque vous comparez l’expérience
européenne avec celle de nombreuses sociétés américaines
du secteur privé, les Européens, comme vous l’avez souligné,
ont été en mesure de «livrer la marchandise»
en investissant une partie beaucoup moins importante de leur PIB que les
Américains. On me dit qu’ils ont pu y arriver essentiellement en
tentant le coup avec la profession médicale, tandis que le système
de libre entreprise des États-Unis avait et continue d’avoir bon
nombre de flambeurs dans le domaine de la médecine. En Europe, ils
ont trouvé le moyen de les éliminer. Pouvez-vous confirmer
s’il existe des plafonds généralisés?
 

  

M. Coffey:
Oui. Pour revenir à l’étude suédoise, les auteurs
ont rapporté des renseignements sur trois spécialités:
40 médecins du secteur privé travaillaient à l’extérieur
de l’hôpital et 20 médecins du secteur public travaillaient
à l’intérieur. Les coûts au titre des services d’ophtalmologie
dans les hôpitaux du secteur public étaient de 28 p. 100 plus
élevés; par ailleurs, chez les oto-rhino-laryngologistes,
les coûts étaient de 17 p. 100 plus élevés dans
les hôpitaux du secteur public que dans l’hôpital privé;
et pour ce qui est de la chirurgie générale, de la médecine
interne et de la dermatologie, les coûts étaient de 13 p.
100 plus élevés. De toute évidence, grâce à
la concurrence, on a pu réduire les coûts liés aux
médecins spécialistes.
 

  

Toutefois,
on ne peut gagner sur tous les tableaux, et si vous tenez réellement
à la concurrence, vous devez vous tenir prêt à apprendre
comment offrir les compétences qui sont à même de satisfaire
les deux côtés.
 

  

Il est intéressant
de prendre connaissance seulement des conclusions de l’expérience
de Stockholm.
 

  

Le président:
Qui en a fait l’évaluation? Est-ce que c’est l’hôpital lui-même?
 

 

M. Coffey:
Non, non.
 

  

Le président:
Je voulais seulement m’assurer qu’il s’agit d’une analyse objective.
 

  

M. Coffey:
La majeure partie de ce travail a été effectuée par
ce monsieur à qui Michel faisait allusion tout à l’heure,
ce Johan Hjertqvist, qui est un économiste participant à
ce projet avec le Stockholm Council.
 

  

Voici la conclusion:
(Traduction)
 

Alors
que les opposants des réformes vers la privatisation avaient prédit
que le secteur privé, en cherchant à réaliser un bénéfice
pour ses actionnaires, aurait tendance à faire grimper les coûts
et à réduire les normes d’efficience, c’est en réalité
le contraire qui s’est produit. De façon générale,
à Stockholm, les entrepreneurs privés arrivent à exercer
leurs activités avec moins de personnel et des budgets moindres,
tout en offrant les mêmes traitements à davantage de patients
que leurs homologues du secteur public. À titre de programme pilote
visant à mettre à l’épreuve les effets potentiels
des mécanismes de la concurrence sur les régimes de soins
de santé du secteur public, le marché interne de Stockholm
a démontré que le secteur privé était capable
de surpasser de façon remarquable les installations administrées
par l’État en réduisant les coûts, en améliorant
les soins et en sauvant des vies.

Le président:
Étiez-vous présent lorsque le professeur de l’université
McGill a témoigné?
 

  

M. Coffey:
J’ai pu entendre la fin de son exposé.
 

  

Le sénateur
Morin:
Vous n’avez pas suivi l’échange?
 

  

M. Coffey:
Oui. C’est la raison pour laquelle je l’ai lu.
 

  

Le président:
Voici une question pour laquelle vous n’avez peut-être pas de réponse,
mais cela m’aiderait beaucoup si vous pouviez y réfléchir.
Supposons un instant que l’on veuille réaliser trois expériences
au cours desquelles vous pourriez continuer d’utiliser le modèle
à payeur unique, mais dont la structure pourrait être très
différente. Il y aurait un certain degré de concurrence entre
les institutions, et ainsi de suite. Vous voudriez réaliser une
expérience qu’il soit possible de reproduire, dans le sens que,
peu importe que les résultats soient intéressants ou non,
vous voudriez être en mesure d’en tirer des conclusions raisonnables
et renouvelables. De la même façon, lorsque l’on procède
à une expérience avec des médicaments on espère
qu’elle pourra être reproduite et que les gens ne vont pas la démolir
en vous reprochant d’avoir mal choisi les patients ou autre chose.
 

  

Je ne sais
pas si vous le feriez avec un hôpital général ou une
clinique spécialisée qui effectue des remplacements d’articulations
ou d’autres types d’interventions.
 

  

Avez-vous déjà
pensé à la forme que ces expériences pourraient prendre?
En supposant que nous ayons la possibilité de ne pas tenir compte
de la Loi canadienne sur la santé et que nous puissions demander
à une province ou à une collectivité de réaliser
cette expérience, que feriez-vous?
 

  

M. Coffey:
Je suis un grand partisan de l’étapisme, et je pense que l’attitude
la plus prudente consisterait à sélectionner un groupe de
spécialistes, peut-être un groupe de chirurgiens cardiaques
ou encore une clinique multidisciplinaire. On pourrait penser à
des endroits comme la clinique Mayo ou la clinique Cleveland ou d’autres
cliniques réputées et multidisciplinaires de haute qualité.
Nous n’en avons pas beaucoup de ce genre au Canada. Elles se trouvent pour
la plupart dans des hôpitaux universitaires. Néanmoins, on
pourrait les encourager, et déjà les gens commencent à
penser à la possibilité de se doter de cliniques spécialisées
de première classe et de bonne qualité qui offriraient des
services dans les domaines où les listes d’attente sont les plus
longues, à savoir l’orthopédie, les cataractes, les maladies
cardiaques et peut-être aussi les diagnostics. Par exemple, les spécialistes
dans le domaine de l’imagerie de l’université McGill ont ouvert
un centre de diagnostic privé à Montréal.
 

  

Le président:
Est-ce qu’il appartient à l’université?
 

  

M. Coffey:
Et bien, la plupart des spécialistes sont des universitaires.
 

  

Le sénateur
Morin:

La clinique appartient aux médecins.
 

  

Le président:
Donc, elle appartient aux médecins, et non à l’université?
 

  

M. Coffey:
Non, il s’agit d’une clinique de diagnostic privée de Westmount
Square. Cette clinique est dotée d’un matériel de pointe
en matière d’imagerie et de médecins de haut calibre pour
interpréter les résultats. Bien des gens parmi mes connaissances
y ont fait appel et en ont été extrêmement satisfaits.
Les résultats sont remis au médecin traitant très
rapidement. La clinique est reliée électroniquement avec
les hôpitaux, de sorte que les médecins peuvent transmettre
les images immédiatement au Royal Victoria ou à l’Hôpital
général, s’ils le désirent.
 

  

Le sénateur
Morin:
Mais il ne s’agit pas d’une expérience.
 

  

M. Coffey:
C’est vrai, mais si vous vouliez effectuer une expérience en matière
de diagnostic ou d’imagerie dans le secteur privé, c’est ce genre
de groupe qui, moyennant des aménagements, pourrait déclarer:
«Oui, certainement, nous signerons un contrat avec la régie
régionale de la santé et nous conclurons une entente financière
pour effectuer des diagnostics sur 1000 patients cette année à
un certain prix déterminé.»
 

  

Le président:
Je crois que c’est le mode de fonctionnement des cliniques en Alberta.
Je pense que tous nous avons beaucoup apprécié le témoignage
d’une personne provenant d’une clinique de radiographie privée de
l’Ontario. Les gens de cette clinique font exactement ce que je viens de
décrire. Ils louent les installations de radiographie de l’Hôpital
Sunnybrook entre 6 heures du matin et 22 heures le soir, une heure à
laquelle elles ne sont jamais utilisées. Les employés de
la clinique sont rémunérés exclusivement par le Régime
d’assurance-maladie de l’Ontario, par le régime d’assurance gouvernemental,
et ils n’acceptent aucun patient du secteur privé; ainsi leur rémunération
ne comporte aucune part du secteur privé. En réalité,
ils se contentent tout simplement d’allonger les heures d’ouverture de
l’installation de quatre heures par jour, cinq jours par semaine.
 

  

M. Coffey:
Je vois.
 

  

Le président:
Ils se concentrent surtout sur le cancer du sein et ils sont en train d’élargir
leur champ d’action au cancer de la prostate. Ils ont réussi à
faire fondre les listes d’attente pour les radiographies pour le cancer
du sein à Toronto.
 

  

Ce sont des
exemples isolés, mais si nous voulons réellement changer
le système, je pense que nous aurons besoin d’étayer nos
dires de preuves scientifiques. J’ai aussi été universitaire
au début de ma carrière, aussi je m’efforce de trouver un
moyen de concrétiser tout cela.
 

  

M. Coffey:
Oui, bon, comme je le disais, nous n’avons pas réellement été
autorisés sur le plan juridique à faire quelque expérimentation
que ce soit.
 

  

Le président:
Non, en effet.
 

  

M. Coffey:
Donc, nous faisons un peu figure d’innocents, et lorsque nous voyageons
à l’étranger et que l’on nous demande: «Que se passe-t-il
avec la réforme du système de santé ou le financement
au Canada?», je réponds: «Et bien, voilà ce qui
se passe.»
 

  

M. Kelly-Gagnon:
Il est possible de réaliser des expériences sur le plan géographique,
par exemple au cours desquelles une province ou une collectivité
donnée pourrait essayer l’une des options que nous venons d’envisager.
Il est également possible d’expérimenter avec un segment
de la population, et je pense aux maisons de soins ou à d’autres
segments de population où l’on est déjà habitué
à disposer d’un certain éventail de services.
 

  

Il pourrait
s’agit d’expériences très modestes, parce que j’envisage
la question du point de vue qui est intéressant sur le plan intellectuel,
ce que j’appellerais de la «politique du réel». Nous
vivons dans un certain contexte politique au Canada, avec lequel nous pouvons
être d’accord ou pas, là n’est pas la question. C’est la situation
réelle. Je pense que les maisons de soins et les installations semblables
pourraient se montrer davantage prêtes, disons, à permettre
à une vieille dame de 85 ans, qui est presque aveugle à cause
des cataractes, mais qui dispose d’une petite pension, d’avoir accès
à certains services offerts par la maison.
 

  

J’ai écouté
ce professeur de McGill, et il me semble que même lui reconnaissait
que l’on pouvait faire quelque chose dans ce domaine.
 

  

Le sénateur
Keon: Nous parlons de quelque chose de vraiment intéressant avec
toute cette question de capital pour de nouvelles entreprises. Les hôpitaux
du secteur public au Canada ne sont pas en mesure de réunir des
fonds, les banques ne leur prêteront pas d’argent et ils ne sont
pas autorisés à contracter des dettes. Par conséquent,
l’idée de former une structure organisationnelle qui construirait
un nouvel hôpital, ou quoi que ce soit d’autre, pour le revendre
ensuite grâce au crédit-bail fait vraiment son chemin. Je
n’amène pas le sujet pour en débattre avec vous, je voulais
seulement le mettre sur le tapis pour que vous puissiez en tenir compte
lorsque vous irez de l’avant avec quelques-unes de vos idées intéressantes.
Merci.
 

  

M. Coffey:
Est-ce que ça s’applique au secteur privé ou seulement aux
hôpitaux du secteur public?
 

  

Le sénateur
Keon:
Non, c’est une sorte d’hybride. J’ai connaissance, par exemple,
d’un grand hôpital public en Ontario qui jongle avec l’idée
de s’associer avec le secteur privé pour construire un nouvel hôpital
qu’il pourrait ensuite louer grâce à une entente de crédit-bail,
parce qu’il est impossible aux administrateurs de réunir les fonds
pour le construire eux-mêmes.
 

  

L’aspect qui
est intéressant, c’est que ces spécialistes qui décident
d’ouvrir une clinique privée n’ont quant à eux aucun problème
à obtenir de l’argent auprès des banques.
 

  

M. Coffey:
Oui, c’est exact.
 

  

Le sénateur
Keon:
Mais, un hôpital du secteur public ne pourra pas réunir
les fonds nécessaires parce que les banques ne lui prêteront
qu’un petit montant.
 

  

M. Coffey:
Nous n’avons pas essayé de réunir des fonds pour la construction
d’un hôpital privé, même s’il y a un groupe à
Montréal en train de se former dans ce but. Ces gens pensent que
nous avons sérieusement besoin d’un nouvel hôpital.
 

  

Le président:
Pour poursuivre avec ce que disait le sénateur Keon, nous nous trouvions
à Vancouver la semaine dernière et nous avons entendu parler
d’un nouvel hôpital à Abbotsford qui y sera construit exactement
de la manière que le sénateur Keon vient de décrire,
c’est-à-dire qu’un entrepreneur du secteur privé le construira,
et tout comme pour un édifice à bureaux, la province le louera
ensuite au moyen d’une entente de crédit-bail. La province a tout
simplement trouvé qu’il était plus facile de financer les
coûts d’investissement en faisant appel au crédit-bail.
 

  

M. Coffey:
Certainement.
 

  

Le président:
Malheureusement, étant donné la façon dont les administrations
tiennent leur comptabilité, les dépenses en capital doivent
être comptabilisées au cours de l’année où elles
sont effectuées. Donc, si vous investissez 100 millions de dollars
pour la construction d’un hôpital, vous devez l’inscrire au cours
de l’année un. Si vous consacrez 10 millions de dollars par année
à des versements de crédit-bail, vous inscrivez 10 millions
pour l’année, et ainsi, étant donné l’obligation de
réduire le déficit, nous nous retrouvons dans un système
où la construction d’hôpitaux consistera essentiellement en
propositions de rachat par crédit-bail.
 

Soit dit en
passant, et c’est intéressant de le souligner, cette pratique a
suscité passablement d’opposition de la part des syndicats, des
Friends of Medicare, et autres groupes similaires. Cela n’a rien de surprenant.
 

  

La sénatrice
Léger:
C’est peut-être très naïf, mais si
j’ai bien compris, secteur privé égale profit, et pour faire
des profits, il faut réduire les coûts, et si on réduit
les coûts, d’après ce que j’entends ici, les gens sont plus
heureux, c’est-à-dire que les patients sont plus heureux, qu’il
y a davantage de travailleurs, davantage d’infirmières au travail
et que, soudainement, on se retrouve avec énormément de docteurs
dans le secteur privé, alors que c’était impossible dans
le régime gouvernemental. Est-ce que ce scénario, dans le
contexte du secteur privé, est vrai pour tout le monde? J’ai compris
que les appareils sont loués entre 6 heures du matin et 22 heures.
Est-ce que ce service est offert à tous?
 

  

M. Coffey:
Oui. Si on jette un coup d’oeil sur la proposition de Universal
Private Choice
, la «raison d’être» de cette étude
consiste à donner à tous les Canadiens, riches ou pauvres,
la possibilité de se prévaloir des services offerts par le
secteur privé. C’est unique, et c’est la raison pour laquelle je
suis tellement enthousiaste au sujet de cette proposition. Elle s’insère
non seulement dans l’éventail politique, mais aussi dans l’éventail
économique. Avec cette proposition, tout le monde y trouve son compte,
à mon avis. Les personnes à faible revenu peuvent toujours
utiliser, par exemple, un document émis par les services de santé
gouvernementaux leur permettant d’acheter un service de santé de
base dans le secteur privé, s’ils veulent élargir la gamme
des possibilités. Bien entendu, les riches ne sont pas un sujet
de préoccupation, parce qu’ils jouissent d’une grande latitude —
ils peuvent toujours se retirer ou peu importe. Ce sont les pauvres gens
à qui nous voulons redonner un certain pouvoir, afin qu’ils puissent
aller dans les hôpitaux, consulter des médecins et des cliniques
avec le pouvoir d’achat correspondant pour forcer ces intervenants à
s’améliorer. En effet, s’ils n’obtiennent pas un bon service, si
le docteur ne leur consacre pas suffisamment de temps, ils disposent du
pouvoir d’aller ailleurs. Et il en va de même avec les hôpitaux.
 

  

On favorise
ainsi la mise en place de la concurrence, mais pas dans le mauvais sens
du terme, parce qu’on donne ainsi le choix à tout le monde. Cet
environnement semble instaurer le type d’équilibre que les Canadiens
recherchent, selon moi. Ils ne veulent pas qu’il y ait énormément
d’écart entre les choix qui ne sont pas offerts à tous et
chacun.
 

  

[français] 

  

M. Kelly-Gagnon:
Je voudrais aussi, bien souligner le fait qu’il faut éviter d’avoir
une conception — je ne dis pas que vous l’aviez, je fais juste un commentaire
général — statique des ressources, c’est-à-dire de
penser qu’il y a une tarte et qu’il s’agit de se partager la tarte.
 

  

Il ne faut
jamais sous-estimer la puissance de l’innovation et de la recherche au
niveau technologique, c’est-à-dire que si les gens ont un incitatif,
il va y avoir un incitatif au niveau technologique à améliorer
la machinerie.
 

  

L’exemple que
je donne toujours, celle d’un vidéo VHS pour regarder des films
chez moi: on en avait acheté un au début des années
1980 et il coûtait, à l’époque, 1 200 $.
J’en ai acheté un la semaine dernière de meilleure qualité
que celui que mes parents avaient à l’époque, et je l’ai
payé 129 $. Pourquoi le baisse du prix? C’est parce
que des entreprises ont eu un incitatif pour favoriser l’amélioration
technologique.
 

  

De la même
façon, il ne faut jamais sous-estimer l’importance de l’amélioration
des techniques «manageriales». Si on prend l’exemple des entreprises
comme General Electric, ils ont complètement fait une «regénierie»
des pratiques qu’ils faisaient. Et, parfois, on prend pour acquis certaines
choses: on les fait d’une telle manière parce qu’on les a toujours
faites comme cela.
 

  

Toutefois,
il faut un motif ou un incitatif pour réviser ces pratiques «manageriales»
comme l’ont fait les infirmières en Suède où on leur
a donné un meilleur rôle à des endroits où auparavant
le médecin était appelé. Ce n’était pas seulement
le nombre d’infirmières ou le nombre de dollars qui comptaient,
mais la façon dont ces infirmières travaillaient. On peut
même donner un meilleur rôle à des aides-infirmières
à des endroits où les infirmières régulières
étaient appelées.
 

  

Cela est possible.
Soyons francs. C’est possible de le faire à l’intérieur d’un
système public, mais les incitatifs sont beaucoup moins puissants.
Il faut donc vraiment penser

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