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Textes d'opinion

Un bilan mitigé: en matière de fiscalité et de réduction de la taille de l’État, le gouvernement Charest n’a pas vraiment tenu ses promesses

Il y aura quatre ans en avril 2007 que le gouvernement du Parti libéral du Québec (PLQ) a été porté au pouvoir. À l’automne 2002, le congrès du PLQ avait adopté son «Plan d’action du prochain gouvernement libéral» et un an après l’élection le nouveau gouvernement publiait un «Plan de modernisation [de l’État]». Avec les rumeurs d’élections automnales qui courent, les Québécois s’interrogent: Le gouvernement du PLQ a-t-il tenu les promesses d’allégement du fardeau fiscal des particuliers et de la réorganisation de l’État contenues dans ces documents?

Fiscalité et finances publiques

C’est dans le domaine des impôts que le Plan d’action de 2002 était le plus explicite: «Un gouvernement du Parti libéral du Québec enclenchera, dès le dépôt de son premier budget, un plan de réduction de l’impôt des particuliers d’un milliard de dollars par année pendant cinq ans.» Cette promesse ne sera pas tenue. Le premier budget du gouvernement libéral ne contenait aucune réduction d’impôt. Les trois budgets subséquents ont cumulativement réduit le fardeau fiscal d’environ 626 millions $ (à la fin de l’année fiscale 2006-2007), en comparaison des 3 milliards qu’aurait exigés la promesse du Plan d’action, soit un cinquième du montant promis.

Les seules baisses qui sont survenues au cours des quatre dernières années proviennent d’une simplification du régime fiscal (la fusion du régime général et du régime dit simplifié en un seul régime depuis le 1er janvier 2005) et de l’introduction d’une déduction de 500 $ pour les travailleurs (qui passera à 1000 $ à partir du 1er janvier 2007).

Dans ses documents officiels le gouvernement gonfle ses réductions d’impôt sur le revenu des particuliers en y ajoutant des crédits d’impôt remboursables et les montants résultant de l’indexation des tranches de l’impôt. Les premiers, reliés principalement aux nouveaux programmes de Soutien aux enfants et de Prime au travail, consistent toutefois en des subventions aux familles et aux salariés à faible revenu. Ils sont distribués même aux personnes qui paient peu ou pas d’impôt et il est donc trompeur de les qualifier de réduction d’impôt. Quant à l’indexation du régime fiscal, qui existait avant l’élection du présent gouvernement, elle ne fait qu’empêcher les impôts réels d’augmenter avec l’inflation.

Au chapitre des dépenses, les dépenses de programmes réelles per capita ont continué sous le gouvernement Charest la progression qu’elles avaient amorcée à la fin de l’avant-dernier mandat du Parti Québécois, mais à un rythme réduit. Depuis 2003-2004, elles sont passées de 6445 $ à 6651 $ (à la fin du présent exercice). Il est vrai que le rapport des dépenses de programmes au PIB a diminué, passant de 18,1% à 17,7% entre 2002-2003 et 2005-2006. Il faut toutefois noter que cette réduction est uniquement due à l’augmentation du PIB et que les deux gouvernements péquistes précédents avaient présidé à une réduction du rapport encore plus forte puisqu’il était de 21,3% en 1994-1995 et de 18,9% en 1998-1999.

Même en excluant les «pertes exceptionnelles» de la Société générale de financement, deux des quatre dernières années ont été marquées par un léger déficit. Les excédents cumulés (qui permettent de financer d’éventuels déficits futurs selon la Loi sur l’équilibre budgétaire), qui étaient de 1 177 millions $ le 31 mars 2003, ont été réduits à 155 millions $ au 31 mars 2006. De plus, à cause des dépenses d’immobilisation la dette du secteur public a continué d’augmenter depuis le 31 mars 2003. La dette a toutefois diminué en proportion du PIB (de 74% à 67% au cours des trois dernières années) et la cote de crédit du gouvernement s’est améliorée auprès des principales agences de crédit.

La «réingénierie» de l’État

Le PLQ a promis un allégement des structures gouvernementales (y compris l’abolition d’organismes) et une réévaluation des programmes.

Le gouvernement s’est spécifiquement engagé à ne remplacer qu’un fonctionnaire sur deux au fur et à mesure des départs à la retraite. De fait, le nombre de fonctionnaires, qui avait atteint un sommet de 75 800 en 2003-2004, a été réduit de 2 500 personnes (en équivalent temps complet) depuis.

En ce qui concerne les organismes d’État eux-mêmes, 16 ont été officiellement abolis par le gouvernement Charest. Cependant dans à peu près la moitié des cas, les responsabilités des organismes abolis ont été transférées ailleurs dans l’appareil gouvernemental. De plus, comme d’autres organismes ont été créés pour administrer de nouveaux programmes, l’effet net est encore plus modeste. Au 6 juin 2006, le site Web du gouvernement présente une liste de plus de 200 organismes. L’abolition d’une vingtaine d’autres organismes reste toutefois au programme, dont celle de la Société nationale de l’amiante et de la Société nationale du cheval de course.

Même si certains opposants l’ont accusé de vouloir «démanteler l’État québécois», le Parti libéral du Québec n’avait pas promis de réduire de façon draconienne le rôle et la taille de l’État. Il avait par contre promis de réduire les impôts et d’alléger l’État. Même à l’aune de ce critère, on doit conclure de ce bilan sommaire que les résultats sont modestes et ambigus.

Tasha Kheiriddin est vice-présidente exécutive de l’Institut économique de Montréal.

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