Pierre Jeanniot plaide pour un Canada à ciel ouvert
Des ententes sur la libéralisation des marchés de transport aérien sont en négociation ou ont été conclues entre l’Europe, les États-Unis, et des marchés en émergence comme l’Inde, la Chine et la Russie. Le Canada et la Chine annonçaient, le 19 avril dernier, un élargissement important de leur accord bilatéral, et on croit comprendre que des négociations s’ouvriront bientôt avec l’Inde.
Le ministère fédéral des Transports semble prêt à profiter de ce mouvement à l’échelle internationale pour poursuivre le processus de libéralisation du marché canadien. Il envisage notamment la possibilité de permettre aux transporteurs étrangers d’offrir des vols entre les villes canadiennes – ce qu’on appelle le cabotage – et de revoir à la hausse la limite imposée à la propriété étrangère des transporteurs nationaux, actuellement fixée à 25%.
Il s’agirait dans les deux cas d’excellentes nouvelles pour les consommateurs et l’économie du pays en général.
L’Accord bilatéral «ciel ouvert» signé avec les États-unis en 1995 avait déjà grandement facilité les déplacements des gens d’affaires et des voyageurs d’agrément. Cet accord autorisait tout transporteur canadien ou américain à offrir des services aériens transfrontaliers sans restriction quant aux tarifs, à la fréquence des vols ou au type d’appareils. La capacité des services réguliers de transport aérien entre les deux pays a connu une forte croissance à partir de 1995 – dont une hausse soudaine et marquée de 25% dès la première année.
L’élimination des restrictions concernant le cabotage et la propriété étrangère pourrait apporter d’importants bénéfices supplémentaires à l’industrie canadienne et aux voyageurs.
D’une part, la hausse de la limite en matière de propriété étrangère donnerait aux transporteurs canadiens accès à un marché de capitaux élargi, ce qui aurait un effet stabilisateur important étant donné la nature plutôt volatile de l’industrie.
De plus, cette mesure faciliterait l’entrée de nouveaux concurrents dans le secteur et permettrait aux petits transporteurs qui désirent élargir ou améliorer leur flotte d’attirer le capital nécessaire au financement de leur expansion. Réciproquement, les investisseurs canadiens pourraient augmenter leur participation dans des compagnies étrangères et les compagnies canadiennes pourraient étendre leurs opérations sur d’autres marchés.
D’autre part, comme dans n’importe quel secteur, la concurrence accrue exercerait une pression à la baisse sur les prix. Elle entraînerait également une augmentation du nombre de vols et un choix de destinations plus varié. (…)
La prochaine étape pourrait être la poursuite d’une intégration totale des marchés aériens en Amérique du Nord dans le cadre de l’ALÉNA, ou encore l’ouverture de pourparlers avec l’Union européenne sur la même base que l’accord que l’Europe a tenté, sans succès jusqu’ici, d’obtenir avec les États-Unis.
Le Canada devrait saisir les occasions, quand elles se présentent, de négocier un accord du type «Open Skies» avec toute nation qui en a déjà un en place avec les États-Unis. Il devrait aussi offrir à d’autres régions «libéralisées» du monde des ententes de réciprocité similaires en temps opportun.
Pierre Jeanniot est ex-PDG d’Air Canada et auteur de la Note économique intitulée Transport aérien: pour un Canada à ciel ouvert