Taxe rose : mesdames, à vous de l’abolir
La « taxe rose » a fait beaucoup jaser cette semaine, surtout depuis qu’une demande de recours collectif a été déposée par une Montréalaise qui dénonce le fait que plusieurs produits féminins sont vendus à un prix plus élevé que les produits ciblant la clientèle masculine. L’instigatrice de cette démarche demande que soit dédommagée toute personne ayant acheté un produit « dont le prix du ou des produits pour femmes est supérieur à ceux du ou des produits pour hommes ayant une qualité sensiblement identique pour une quantité équivalente ».
Notons d’abord que l’utilisation du terme « taxe » n’est pas appropriée pour expliquer le phénomène qui nous préoccupe. On parle plutôt ici d’écart de prix. Autrement dit, ce n’est pas un de nos paliers de gouvernement qui impose une taxe sur les produits féminins, mais plutôt les entreprises qui répondent au jeu de l’offre et la demande pour établir leur prix.
Ceci dit, c’est vrai que cette « taxe rose » pénalise les Québécoises. Il existe bel et bien des différences de prix très apparentes pour des produits sensiblement pareils. Par exemple, un modèle de rasoir pour homme se vend 9,07 $, alors que son équivalent féminin coûte 10,34 $. Un parfum pour homme est affiché à un peu moins de 60 $, tandis que la version féminine se vend 72 $. Et ainsi de suite.
Pourquoi cette discrimination tarifaire ? Tout simplement parce que les femmes sont plus sensibles à la publicité que les hommes pour ces types de produits. Les entreprises sont donc amenées à faire plus de marketing et refiler les coûts plus élevés aux consommatrices. Si un parfum pour homme coûtait aussi cher qu’un parfum pour femme de la même marque, il ne se vendrait pas. Et ça, les compagnies le savent.
Ce phénomène, ancien et répandu dans presque tous les marchés, n’est pas relié à une volonté d’exploiter les femmes, mais plutôt à la volonté de payer de chacun.
Les exemples sont nombreux :
- Les compagnies aériennes facturent des prix élevés aux gens d’affaires qu’aux touristes. Les touristes, plus flexibles et plus sensibles au prix, vont accepter ces conditions, par exemple en achetant leurs billets longtemps à l’avance, contrairement aux gens d’affaires qui, eux, préfèreront payer le plein prix.
- Les cinémas chargent moins cher le mardi, une journée peu populaire. Ils peuvent ainsi vendre des billets à des gens qui seraient rebutés par le prix normal, tout en conservant la clientèle prête à payer plus cher.
- La STM offre des billets moins chers aux étudiants et à certaines autres catégories de passagers.
- Les hôteliers offrent un tarif différent en fonction de la provenance de l’achat. Par exemple, si vous avez réservé votre chambre sur une plateforme en ligne, vous risquez de payer moins cher que si vous la réservez au comptoir.
- De nombreuses boîtes de nuit font payer les hommes, alors que les femmes peuvent y entrer gratuitement.
Bref, la discrimination de prix, c’est tout simplement identifier les personnes et groupes qui ont une sensibilité forte ou faible face au prix.
Comment éliminer ce phénomène ? Certains élus s’unissent déjà pour réclamer au gouvernement l’abolition de la « taxe rose ». Complètement absurde ! Québec ne peut tout de même pas se mettre à contrôler tous les prix. Autant décider de passer vers une économie et une société où le gouvernement décide de tout. On en connait les résultats, visibles dans les pays communistes au 20e siècle.
Chères amies, il existe une solution toute simple pour régler cette injustice : choisissez systématiquement les produits les moins chers, qu’ils soient roses ou bleus. Mon mari le fait, lorsqu’il revient de l’épicerie avec le savon en solde, et beaucoup de femmes le font, en achetant des produits dits masculins. En fait, environ 60 % des marques pour hommes sont achetées par des femmes. Tant que nous serons captives des marques féminines, nous inciterons les compagnies à nous vendre plus cher.
Pascale Déry is Senior Advisor, Communications, Current Affairs, at the MEI. The views reflected in this op-ed are her own.