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Privatiser la SAQ ? Mieux, libéraliser !

Le sort de la SAQ est devenu un enjeu électoral : faut-il la privatiser ou conserver à l’État son monopole sur la vente d’alcool ? Ni l’un ni l’autre. Remplacer un monopole public par un monopole privé ne nous avancerait pas. La solution est de libéraliser la vente d’alcool au Québec.

Ça veut dire quoi ? Concrètement, le gouvernement doit permettre à de petits commerçants d’importer et de vendre des vins de toutes sortes, sans passer par la SAQ ni payer la majoration qui y est associée. La même latitude serait offerte aux épiceries, aux dépanneurs, aux restaurants et à tout commerce qui se lancerait dans l’aventure. Crèmerie et caviste ? Pourquoi pas ! (Oui, ça existe.)

Les consommateurs bénéficieront de plus de choix, puisque partout au Québec, des centaines d’acheteurs de vin laisseront libre cours à leurs préférences et à celles de leurs clients, comme cela se fait en France, par exemple. Bien des Québécois apprécient ce choix qu’on leur offre quand ils voyagent.

La SAQ pourra poursuivre ses activités. Elle cessera seulement d’avoir le dernier mot sur tout ce qui est importé et vendu au Québec et subira une réelle concurrence.

Si cette idée ne semble pas très radicale, c’est qu’elle ne l’est pas. Un sondage Léger réalisé l’an dernier pour le compte de l’IEDM montre que 71 % des Québécois sont d’accord pour que des commerçants puissent importer et vendre du vin sans passer par la SAQ. La proposition reçoit une majorité d’appuis chez les électeurs de tous les partis, incluant ceux de Québec solidaire ! La proposition récente de la CAQ et l’ouverture démontrée par le gouvernement libéral n’ont donc rien d’étonnant.

Deux faux arguments

Deux arguments sont habituellement invoqués pour combattre l’idée de mettre fin au monopole de la SAQ. Ni l’un ni l’autre ne tient la route.

Le premier est que la libéralisation ferait perdre d’importants revenus à l’État. C’est complètement farfelu. Le gouvernement ne possède aucune station-service et ça ne l’empêche pas de récolter des millions en taxes sur l’essence. La même logique prévaut pour l’ensemble du secteur du commerce de détail.

Le second est que les prix de la SAQ seraient déjà très bas et qu’il n’y a aucun gain à faire pour les consommateurs. Des comparaisons avec l’Alberta sont souvent mentionnées. Il y a plusieurs problèmes dans cet argument.

D’abord, la vente d’alcool en Alberta n’est pas entièrement libéralisée, puisque le gouvernement y contrôle toujours la distribution. Ensuite, le niveau et le coût de la vie ont augmenté de façon très importante depuis que la revente d’alcool a été confiée au privé. Si les gens gagnent plus cher et que les maisons se vendent plus cher, il est parfaitement compréhensible que l’alcool, un produit de luxe, se vende plus cher. De toute façon, si les prix à la SAQ sont déjà bas, elle n’a pas à s’inquiéter, n’est-ce pas ?

Le choix

Chaque été, je vais en vacances en famille quelque part sur la côte est américaine. On trouve en chemin un magasin de vin grand comme à peu près trois SAQ, qui vend aussi des fromages et des chocolats et propose des vins pour les accompagner. Sur les étalages, les employés notent leurs préférences.

Dans notre village de vacances, ma boutique favorite est grande comme un dépanneur, mais pleine à craquer. Il y a quelques années, un ami avait trouvé une bière de banane dans une belle bouteille jaune.

On dit que les Québécois sont entreprenants et innovateurs. Plusieurs fabriquent du vin et toutes sortes d’alcools, et certains de ces produits ont une renommée qui dépasse largement nos frontières.

Il n’y a aucun doute qu’on retrouvera ce même dynamisme et cette même créativité chez nos futurs cavistes une fois le marché de l’alcool libéralisé.

Lorsque ce sera le cas, je vais sûrement continuer à fréquenter la succursale de la SAQ près de chez moi, mais celle-ci devra travailler un peu plus fort pour me garder comme client. Il est aussi très probable que j’aille faire un tour chez « Le spécialiste du Scotch », « Portos et chocolats » ou aux « Vins de Vincent », selon ce qu’un marché libre saura m’offrir.

Patrick Déry is a Public Policy Analyst at the Montreal Economic Institute. The views reflected in this op-ed are his own.

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