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Crise au Venezuela – Une question de mauvaises politiques publiques

Alors qu’au Venezuela les projecteurs sont sur le régime Maduro, qui s’enlise toujours plus profondément dans la crise politique, la crise humanitaire bat son plein.

De jeunes enfants meurent, faute de soins et de vivres, et les Vénézuéliens manquent cruellement de produits de base. Une étude réalisée en 2016 démontrait que 74,3 % des Vénézuéliens avaient perdu environ 19 lb (8,7 kg) en un an et que 9,6 millions de personnes mangeaient deux repas ou moins par jour. C’était il y a un an et la situation s’est détériorée depuis.

Il y a plusieurs façons de mésinterpréter la descente aux enfers amorcée depuis le début du chavisme. On lit certaines d’entre elles dans les journaux, ici, presque tous les jours.

La première c’est de se concentrer sur le politique et sur le remplacement de Chávez par Maduro, en 2013. Ou encore, par l’élection parlementaire de 2015, lors de laquelle l’opposition a été élue avec une large majorité. Mais la situation est bien antérieure à cela. Depuis les années 70, bien avant l’élection de Chávez en 2002, le PIB du Venezuela a diminué, alors que celui du Chili a triplé sur la même période, malgré les crises humanitaires et politiques.

La liberté économique, elle, est passée d’un indice de 7 sur 10 à 3 sur 10. Une étude réalisée par trois universités a montré que 82 % des Vénézuéliens vivent aujourd’hui sous le seuil de la pauvreté, contre 48 % avant que Chávez ne prenne le pouvoir. Si les problèmes ont bien été amplifiés et accélérés par le chavisme et la révolution bolivarienne, ses causes sont en revanche bien plus profondes.

La question du pétrole

La seconde erreur d’interprétation est de se concentrer sur la chute du prix du pétrole. (« Le Venezuela peut bien vivre une crise, lui qui tire une grande partie de ses revenus du pétrole ! ») Pourtant, les pénuries ont commencé en 2012, alors que le prix du pétrole était toujours à 100 $ le baril.

Et les dysfonctionnements vont bien au-delà de l’industrie de l’énergie. En 1998, le pétrole représentait 77 % des exportations du pays, contre 96 % en 2013.

Si la nationalisation de l’industrie de l’énergie a bien été une catastrophe, les nationalisations dans les autres industries ont probablement été bien pires.

L’effondrement de l’agriculture, par exemple, est de loin le plus tragique. Et ce n’est pas que l’agriculture qui a été nationalisée, mais bien la chaîne de production alimentaire au complet, qui est maintenant captive de la bureaucratie agricole inefficace.

Ce qui nous amène à la véritable raison de la crise vénézuélienne : de très mauvaises politiques publiques, que les économistes savent néfastes depuis presque aussi longtemps que cette science existe.

On sait par exemple depuis plusieurs centaines d’années que si un prix maximum est instauré et que ce prix maximum est trop faible, il y aura pénurie. C’est un principe aussi banal qui explique comment, au XXIe siècle, un bien comme le papier de toilette peut venir à manquer. Bien que le chavisme ait étendu le contrôle des prix à plus de biens, ces mesures remontent aux présidences de Rómulo Betancourt et Raúl Leoni dans les années 60.

Cela reste cocasse lorsqu’il s’agit de papier hygiénique, mais lorsqu’il s’agit de médicaments et du nécessaire pour effectuer un suivi médical, on ne rit plus. Alors que les combats dans les rues ont fait jusqu’à maintenant plus de 113 victimes, le taux de mortalité infantile est passé à 30 % en 2016 et le taux de mortalité maternelle, à 65 %. Ces taux sont respectivement de 0,5 % et de 0,01 % au Canada.

Bien que plusieurs cherchent à expliquer la crise du régime Maduro par l’élément politique ou par la conjoncture économique, c’est du côté des mauvaises politiques publiques qu’il faut regarder pour vraiment comprendre comment un pays bien pourvu en ressources peut sombrer dans une crise humanitaire aussi importante.

Mathieu Bédard is Economist at the Montreal Economic Institute. The views reflected in this op-ed are his own.

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