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Éducation et savoir ne sont pas synonymes

Alors que débute la première rencontre thématique précédent le Sommet sur l'enseignement supérieur, je suggère aux participants de convenir de quelques définitions. C'est parfois si simple de ne pas s'entendre et de se déchirer parce qu'on interprète différemment un concept, même usuel. Prenez l'éducation par exemple. Qu'est-ce que ça signifie pour vous, l'éducation?

Tout d'abord, pour dissiper une confusion trop répandue, l'éducation n'est pas synonyme de savoir, ni de connaissance, à mon humble avis. Le savoir ou la connaissance est largement disponible en ligne ou dans les livres d'une bibliothèque. Qui veut accéder à un savoir particulier peut le faire assez simplement et gratuitement, en général.

Même les savoirs qui sont transmis à l'université ne sont pas hors de portée. Après tout, le réputé Massachusetts Institute of Technology propose du matériel de cours en ligne, et ce sans frais. Prenez le temps nécessaire et vous pourrez tout savoir de la propulsion des fusées! Au Québec, les HEC vont aussi dans cette direction, mais avec deux cours pour l'instant.

Bien entendu, tous ne sont pas autodidactes. La plupart des étudiants universitaires choisissent plutôt de suivre des cours. Et même les autodidactes vont parfois à l'université. Recevoir une éducation universitaire, c'est recevoir quoi exactement?

Je vous propose donc ma définition : l'éducation, notamment à l'université, est un processus d'apprentissage encadré, évalué et reconnu.

L'encadrement

L'encadrement suppose qu'on n'est pas laissé à soi-même. L'éducation est donc un processus où l'on suit un cheminement proposé par quelqu'un d'autre. On suit un cours ou un programme qui ordonne les apprentissages dans le temps. On peut demander des explications supplémentaires, poser des questions, valider sa compréhension de la matière. L'encadrement prend aussi la forme d'un horaire de cours, par exemple. Même un manuel scolaire propose un encadrement avec son découpage en leçons, ces exercices, ces illustrations et ses exemples qui facilitent (ou pas) l'apprentissage. En fait, même les cours en ligne du MIT proposent un certain encadrement en ce sens qu'ils ont été conçus en séquence.

L'évaluation

L'autre aspect de l'éducation, c'est l'évaluation. En d'autres mots, on obtient une note qui valide l'apprentissage ou signale les lacunes. Et le degré de difficulté des évaluations joue pour beaucoup dans la qualité de l'éducation reçue. Si l'on obtient aisément la note de passage, c'est que l'institution d'enseignement s'attend à peu d'apprentissages. Au contraire, un examen rigoureux exige un certain travail personnel, une réflexion sur la matière enseignée, un regard critique aussi, parfois. Ce regard critique est d'autant plus important que ce qui est enseigné fait l'objet d'une sélection préalable par le professeur.

Que l'évaluation soit médiocre ou de bonne qualité, il y a généralement une note au bout du processus d'apprentissage. Un enseignant ou un professeur atteste qu'on a saisi l'essentiel d'un cours ou d'une leçon, que l'apprentissage a avancé.

La possibilité d'être évalué est d'ailleurs ce qui sépare les étudiants libres des étudiants réguliers. Les premiers ne sont là que par intérêt pour la matière enseignée. Les seconds sont là pour une éducation en bonne et due forme.

La reconnaissance

Si la note est obtenue dans un cours, le diplôme en est l'équivalent pour le programme entier. Encore là, quelqu'un évalue qu'on répond à certaines exigences. Et une institution nous délivre une reconnaissance de notre apprentissage. Un diplôme universitaire, par exemple, sera notamment reconnu par les employeurs qui embauchent, parce que ces employeurs reconnaissent la valeur de l'université fréquentée. En obtenant un diplôme en ligne de l'Université Cracker Jack, ou d'une autre institution plus ou moins fictive, le tout pour 199 $, les chances de voir son apprentissage reconnu apparaissent bien minces.

L'éducation est donc un service d'encadrement, d'évaluation et de reconnaissance. Contrairement à l'apprentissage d'un autodidacte, au développement d'une idée ou à la réflexion sur soi et sur la société, où on n'engage que son temps et son énergie, on choisit l'éducation parce qu'elle offre quelque chose de plus à l'étudiant que le seul accès au savoir. Cet avantage présente un coût; il a donc aussi un prix.

La finalité de l'éducation ne se résume pas à l'apprentissage d'un savoir. L'éducation présente aussi une finalité pragmatique, celle d'obtenir une reconnaissance auprès de futurs employeurs ou d'autres universités lorsqu'on souhaite poursuivre ses études. Si ce n'était pas le cas, les étudiants libres seraient bien plus nombreux que les étudiants réguliers dans les salles de cours universitaire. Certains y verront une « marchandisation de l'éducation », une expression dont le flou minutieusement entretenu me rend méfiant. Pourtant, le choix de centaines de milliers d'étudiants démontre constamment que c'est dans le diplôme et sa reconnaissance que se situe la finalité de l'éducation.

Youri Chassin is an Economist at the Montreal Economic Institute. The views reflected in this op-ed are his own.

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