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Recette pour un désastre

Dès le début de la crise, à l’automne 2007, les enseignements de l’économiste britannique John Maynard Keynes (1883-1946) ont été religieusement mis en application. En décembre dernier, le célèbre économiste a même été nommé «Homme de l’année» par le journal Les Échos qui en faisait l’éloge. Dithyrambique. Toutefois, comme en faisait état ma chronique de la semaine dernière, la morosité économique persistante semble indiquer que la reprise américaine n’est qu’imaginaire.

Cette semaine, il faut donc expliquer l’échec retentissant des efforts de relance, alors que Washington a adopté les mesures les plus coûteuses de l’histoire de l’humanité et est intervenu sur plusieurs fronts simultanément afin d’inciter les Américains à emprunter et à consommer.

Selon le credo keynésien, c’est le fait de dépenser qui stimule l’économie. En cas de ralentissement, il faut donc accroître les dépenses de l’État, même au prix d’un endettement excessif. C’est précisément ce que l’administration Obama fait depuis qu’elle est entrée à la Maison Blanche. Or, il serait bon de s’inter-roger sur la provenance de ces sommes que l’État «injecte» dans l’économie.

Dans un premier temps, pour financer ses dépenses, l’État doit soit taxer davantage, soit emprunter les fonds nécessaires. Dans un cas comme dans l’autre, il n’y a absolument aucune création de richesse, puisque l’État, qui ne produit rien, ne fait que s’approprier les revenus déjà existants. L’État déplace l’activité économique d’un secteur vers un autre, rien de plus.

Malgré tout, les pro-keynésiens défendent cette forme d’interventionnisme sous prétexte qu’elle per-met de redistribuer les fonds de ceux qui épargnent vers ceux qui consomment. Or, à moins que les épargnants ne conservent leur argent sous leur matelas, cet argument est boiteux. En effet, celui qui possède des économies choisira l’une des trois options suivantes: (1) acheter des actifs non financiers (immobilier, etc.), auquel cas il est clair que l’argent n’est pas oisif; (2) placer son argent dans un compte bancaire; (3) acheter des titres financiers. Dans les deux derniers cas, le système financier emploie les fonds apportés par les uns pour prêter aux autres, ce qui signifie, là encore, que l’argent ne dort pas.

Cela dit, même si les dépenses gouvernementales ne permettent pas de stimuler l’économie, elles n’en sont pas moins lourdes de conséquences. D’abord, une fiscalité excessive décourage le travail, l’épargne, l’investissement et toute autre forme d’effort, ce qui nuit à la productivité et, par ricochet, à la croissance économique. Ensuite, les programmes gouvernementaux qui visent à subventionner les entreprises et les industries en difficulté minent la santé économique, car celui qui reçoit la manne gouvernementale n’est enclin ni à améliorer sa productivité, ni à réviser son modèle d’affaires. Taxer Pierre pour subventionner Paul: la recette parfaite pour un désastre assuré!

Dans un deuxième temps, quand l’État ne peut plus hausser les taxes et que plus personne ne souhaite lui prêter, il a alors recours à l’impression de monnaie. Il suffit de citer les cas de l’Argentine ou du Zimbabwe pour comprendre les conséquences de ce mode de financement.

Le plus regrettable, ce n’est pas de constater le caractère contreproductif des mesures de relance. L’Histoire l’a prouvé depuis longtemps. L’économiste autrichien Friedrich A. Hayek (1899-1992), prix Nobel d’économie (1974), l’a expliqué. Non. Le plus regrettable, c’est de voir Washington reproduire les erreurs du passé et de permettre aux sables mouvants de l’idéologie keynésienne d’engloutir l’économie américaine. C’est d’assister à la ruine d’une superpuissance ! L’approche keynésienne est un mauvais remède à un diagnostic erroné. À quand la prise de conscience?

Nathalie Elgrably-Lévy is Senior Economist at the Monreal Economic Institute.

* This column was also published in Le Journal de Québec.

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